Hold-Up : faut-il tout regarder, même pour critiquer ?

En ce moment, je suis un peu déphasée. J’ai pas mal ralenti Twitter et mon nouveau travail me demande… bah de travailler, j’étais plus habituée. Du coup, une chose entraînant une autre, je ne sais plus tellement ce qu’il se passe. Mais puisque je sais qu’un vieux monsieur a été élu de l’autre côté de l’Atlantique et que le Covid ohlala. Mais je n’ai pas échappé au phénomène Hold-Up. Et franchement, je suis un peu perplexe sur un truc. A savoir les milliers de vue générées par des gens “qui veulent voir pour critiquer”. Mais ?

Donc je l’annonce : je ne regarderai pas Hold-Up. Déjà parce que je n’en ai absolument pas le temps. J’ai déjà trop de trucs à mater qui m’intéresse alors perdre 2h23 juste pour dire “moi, j’ai vu, je peux critiquer”. Non, désolée. J’ai conscience que ça me servirait de démonstration de tous les arguments fallacieux mais je préfère regarder Defakator ou Horizon Gull. Ou encore Hygiène mentale dont je vous partage la dernière vidéo parce que je l’aime bien. C’est plus court et plus instructif. Je peux concevoir que ce pseudo documentaire soit intéressant d’un point de vue narratif. Et Dieu seul sait que j’aime disséquer les narrations. Mais…

Il est vicieux ce documentaire. Ceux qui sont derrière sont quand même de sacrés génies du marketing. Du pur “pile, je gagne, face tu perds.” Le documentaire avait pour argument “ce que l’on ne veut pas que vous sachiez”. Un truc du genre, des révélations sur le grand complot mondial. Sauf que bon, comme d’hab, on accumule deux heures trente d’avis randoms de gens ayant plus ou moins d’autorité… Un peu comme tous les “experts” de la télé, finalement. Donc la promo est maline car les pro complot ont hâte de remplir leur besace à explications foireuses, les contre ont hâte de le mater pour dire que c’est de la merde. Au pire, si les gens n’avaient pas regardé, ils auraient parlé de censure.

Mais là, c’est un carton. Plus de deux millions de vues, quel superbe argument de popularité. “Ah tu crois vraiment que deux millions de personnes sont des pigeons, hein ?”. On m’a dit ça un jour sur TPMP, c’est un des arguments que je vois le plus. Alors oui, je ne doute pas que toi, derrière ton écran, tu l’as regardé pour critiquer en connaissance de cause. Sauf que faudrait voir à qui on donne de la force. Toujours la même histoire. Surtout que Hold-Up a été désossé par beaucoup de sites de débunk, je suppose que les prochains jours, on va avoir des dizaines d'articles et de vidéos sur le sujet. Et tout le monde est tombé dans le piège, bravo.  A ce rythme, le documentaire devrait atteindre les cinq millions de vues en fin de semaine. Ca va circuler, circuler, circuler. Et le regarder, c’est faire partie du carburant. Même pour le démonter.

Surtout que dans mon entourage, je n’ai vu personne le partager au premier degré mais beaucoup expliquer qu’ils le regardaient ou, du moins, avaient essayé. Et ça me fait lever les sourcils très hauts. C’est un peu comme à l’époque de l’arrivée des masques où je voyais  ma communauté s’énerver en mode “ah, les anti-masques, vous dites ci et ça, vous êtes tous des cons !”. Ok mais vous parlez à qui, en fait ? Je l’ai déjà signalé à l’époque mais je suis toujours fascinée par les cris de “ah mais tous des cons sauf moi” alors que je ne vois pas les cons dans la conversation. Et je suis persuadée que pour Hold-Up, ça va être à peu près la même. J’ai la sensation qu’il y a plus d’anti qui l’ont regardé que de pour. Que sa popularité vient précisément du fait qu’on essaie de le démonter.

Alors je trouve important de démonter un peu tout ce préchi-précha, bien sûr. Mais plutôt que de lui donner des vues pour avoir le plaisir de briller deux secondes, partagez des articles qui démontent le truc. Parce que j'ai comme l'impression que ce travail "critique" n'est pas tellement fait dans de bonnes intentions. J'ai l'impression que c'est surtout saisir une occasion de se montrer condescendant envers "le complotiste" qui n'est même pas convoqué dans cette conversation. La meilleure façon de lutter contre un documenteur du genre, c'est de ne lui donner que peu de visibilité, le laisser bider dans son coin. Là, c'est absolument l'inverse. Mais ça va me donner le prétexte d’écrire une petite série d’article sur l'intelligence, le savoir et le mépris. Parce que je crois qu’en 2020, je me suis mise à détester la condescendance de ceux qui se savent… ou se pensent plus intelligents.