Faut-il cancel Nathalie Portman ?

Le saviez-vous ? Le week-end dernier, tout Hollywood se réunissait pour le grand raout annuel des Oscars. Alors, je ne le savais pas car je m'intéresse vraiment pas à tout ça et que j'ai dû voir un film nominé en tout (Joker et j'ai pas aimé. Par contre, le fait que Joachim Phoenix soit l'exact opposé que tout ce que les mascus qui se branlent sur ce film, j'adore). Mais je vais vous en parler quand même. Enfin je vais vous parler de Natalie Portman et de sa cape féministe.

En fait, je ne vais pas tellement vous parler de Natalie Portman en soi… parce que j'ai vraiment aucun avis sur elle à la base. J'ai dû la voir dans une demi-douzaine de films, ce qui est énorme au vu de ma culture ciné, et sa présence dans un film ne m'agace pas. Côté "activisme", j'ai retenu sa prise de parole sur la sexualisation des jeunes filles à Hollywood, le témoignage de son propre parcours. Et elle fait partie du mouvement Time's Up. Voilà, sinon, elle est mariée à un Français, elle a un enfant ou deux et voilà. Bisous. Donc quand je la découvre avec sa cape féministe, je m'ébahis un peu. Ah tiens, je ne la savais pas engagée.

Et le Twitter féministe tousse très fort. Quoi ? Elle qui n'a jamais tourné sous la direction d'une femme… à part elle-même ? Elle qui n'a embauché aucune réalisatrice dans sa maison de production ? C'est quand même fort de café. Bref, ça se dispute pas mal sur le sujet mais est-ce moi où tout le monde manque un point essentiel : on a aussi le droit de changer. Je vous en parlais semaine dernière par rapport à mes vieux articles : certains ne doivent pas être loin de l'exact opposé de ce que je pense aujourd'hui. Je connais une meuf, quand je l'ai rencontrée en 2006, elle était plutôt gauchiste féministe radicale. Aujourd'hui, sa haine de la gauche et du féminisme lui fait tenir des propos… au mieux gênants de bêtise… Bref, on est inconstant dans nos opinions, pour le meilleur ou pour le pire.

Moi-même, il m'arrive parfois de remettre en cause les propos féministes d'une personne car, par le passé, elle a dit ou fait un truc pas très feministo-compatible. Mais hey… On ne naît pas féministe, on le devient. D'à peu près Simone de Beauvoir. On peut avoir quelques intuitions féministes, bien entendu. Mais les convictions, ça s’apprend, ça se réfléchit. Je parle de féminisme mais il n’y a pas que ce cas-là. Il y a des milliers de cas, de sujets, sur lesquels je n’ai juste même pas réfléchi. Vous vous souvenez sans doute de l’histoire de “mademoiselle” ? Sur le coup, j’ai trouvé ça pas super intéressant comme lutte. Puis je suis allée un peu plus loin que les cris des dames fâchées de ne plus être appelées mademoiselle et j’ai compris le vrai sujet. C’est un sujet administratif. Ni plus ni moins. En séparant la madame de la mademoiselle, on insiste sur l’aspect particulier de la femme non mariée. Alors que l’homme, qu’il ait 3 ou 83 ans, qu’il soit marié ou non, il est un monsieur. Et le livreur d’Agrigel ou la personne qui gère mon dossier chez SFR n’a pas besoin de connaître mon statut marital. Mais vous inquiétez pas les madames qui se sentent proches de la date de péremption, on pourra toujours vous appeler mademoiselle. On n’efface pas le mot du dico, juste la case des formulaires. Par contre, essayez d’arrêter de vivre en fonction de ce que peuvent vous dire les dragueurs de rue. Ils s’en foutent de vous, en vrai. C’est toujours leur ego qui flattent, jamais le vôtre.

Du coup, quand une personne se révèle soudain féministe alors que rien dans le passé n’allait vraiment dans ce sens, faut-il la cancel aussi sec ? Je ne suis pas sans savoir que le pink washing reste toujours un bon coup à jouer pour attirer les projecteurs. Est-ce que Natalie Portman ou Beyoncé, par exemple, ont besoin de lumière ? A priori, je dirais que non surtout que jouer la carte du féminisme, même ultra smooth, c’est se ramasser tout un tas de mascus vénères qui vont venir pourrir tous vos réseaux sociaux et sites d’avis pour dire qu’ils vous détestent et que votre album ou film est une merde et que même qu’ils l’ont pas vu. Mais il faut faire attention aux étiquettes brandies car souvent, ça peut être un bon prétexte pour dire de la merde. “Moi, je suis féministe… ce qui m’autorise donc à prétendre parler au nom de toutes les féministes pour balancer des trucs racistes” (non). 

Du coup, moi, j’ai un peu envie de voir ce que Natalie va faire avant de tenter de la faire taire à coup de “non mais ton activisme en carton, on en veut pas, t’as jamais rien fait !”. Peut-être qu’elle a juste réalisé que sa voix avait du poids et qu’elle pouvait s’en servir pour une cause. Et pourquoi pas lui rappeler *gentiment* la liste des réalisatrices qu’elle pourrait embaucher/avec qui elle pourrait bosser si elle se contente de porter une cape un soir de cérémonie.