Ooooooooh que oui. J’ai une passion dans la vie. Etre reloue. Surtout en entreprise. Je vous ai déjà parlé du “je ne comprends pas” mais voici un autre volet bien plus procédurier. Je vais vous expliquer à quel point, être pinailleur, ça aide. Parce qu’à l’heure où on flirte avec la limite du légal ou que l’on glisse dans un débat juridique, être celle qui est très à cheval sur la loi va vous aider.
Anecdote n°1. Début 2014, je demande une formation aux RH “oui, oui, on revient vers toi”. Quarante-cinq jours plus tard, j’attaque “Bonjour, vous aviez trente jours pour refuser ma demande, ce que vous n’avez pas fait. Du coup, j’ai cette date qui me paraît pas mal. Ok pour vous ?” Du coup, quand ils m’ont proposé une rupture conventionnelle au lieu du licenciement économique pour lequel je m’étais positionnée, il a suffi de deux ou trois mails pour que je récupère trois mois d’indemnités en plus. Ils savaient que j’étais pinailleuse et je choisissais mes mots quand je leur écrivais.
Anecdote n°2 : 2020. J’ai fait ma pinailleuse sur le chômage partiel rétroactif que l’on tentait de m’imposer, envoyant des mails très pompeux à base de “je ne suis pas d’accord, j’étais d’astreinte sur les heures de bureau”, bla bla bla. Puis sur mon avenant quand j’ai reçu une proposition proprement inacceptable. Du coup, quand j’ai envoyé ma lettre de démission à base de “normalement, je peux demander de ne pas faire de préavis vu que je suis en chômage partiel mais ok, je peux rester jusqu’au 31 août si vous voulez.” Réponse :”non, tu te barres au 31 juillet au soir et je te file 50% de ton avenant”. Je… ok. Ca veut donc dire qu’en 2020, j’ai touché un avenant plus élevé alors que j’ai rien foutu pendant des mois vs 2019 où j’ai cravaché toute l’année. Bien. Pourquoi une happy end aussi éclatante que brutale ? Parce qu’ils savaient que j’étais pinailleuse et que j’allais mégoter sur tout. Ah oui, parce que j’ai pas dit mais j’ai démissionné mardi… et j’ai appris jeudi soir que je terminais vendredi. Je suis un peu traumatisée, je vous cache pas. Mais je suis libre. LIBRE !
Au début, je me suis dit “oh mais wouah, quelle chance, c’était inespéré”. Oui parce que c’était exactement ce que je voulais. Là, j’ai sept semaines de liberté devant moi, c’est tellement Noël. Entre mon avenant et les vacances qu’on m’avait imposées en août, je devrais à peine toucher mon épargne pour financer ce petit creux. Et puis j’ai réfléchi. A part Vanessa, ex cheffe toxique de mon ancienne boîte qui a tout fait pour ne pas me lâcher, je n’ai jamais eu à faire un préavis en entier. En même temps, quand je fais ma pinailleuse, je préviens. Je ne le fais pas gratuitement, hein. Quand tout se passe bien, je dis merciiiiii avec plein de i. Mais dès que ça commence à coincer un peu, il faut un peu sortir les mots trisyllabiques et on ajoute du “je ne comprends pas”. Par exemple “je ne comprends pas, selon la convention collective, c’est ainsi que ça fonctionne.” Faire passer un message : je ne suis pas un lapereau. Ce qui est un peu triste parce que c’est tellement adorable, un lapereau…
A travers cette petite histoire de pinaillage, je déconstruis un mythe. Celui qui dit que si j’obtiens ce que je veux, c’est de la chance. Non. Surtout dans le monde l’entreprise, personne n’est là pour te faire une fleur. Alors des fois, c’est fatigant, de pinailler. Parfois, on n’a pas envie de mener ces combats. Et parfois, on laisse faire une connerie RH. Genre dans ma dernière boîte, y a jamais eu le bon intitulé de poste sur mon contrat ou ma fiche de paie et j’ai jamais rappelé à la RH de me faire signer mon avenant sur mon jour de télétravail. Je l’avais sur mon interface administrative mais la RH était trop occupée à fumer des clopes pour me le faire signer. C’est même pas une vanne, les seuls qui ont signé sont ceux qui ont réclamé. Moi, j’ai préféré faire fi et le prendre un peu comme je voulais. De toute façon, dans cette boîte, j’ai jamais autant pris de jours de télétravail en loucedé.
Bref, entretenez votre petite culture juridique du travail car n’oubliez jamais : si l’entreprise n’est pas là pour vous faire des fleurs, vous êtes là pour remettre le clocher au milieu du village. J’adore cette expression.