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Citizen Bartoldi

Blog d'une citoyenne qui rêve d'une société solidaire et égalitaire mais qui voit ce rêve s'éloigner chaque jour un peu plus

Pourquoi la drague de rue fait chier

Publié le 29 Mai 2017 par Nina in Drague dans la rue, Les hommes dominent l'espace public, Patriarcat

Et que vous seriez fort aimables d’arrêter de nous faire subir ça, bordel à queue. J’en ai déjà parlé sur mon blog quelques fois par le passé mais c’était y a longtemps et j’aime à me répéter parfois car comme disait une ancienne collègue commerciale “répéter, c’est convaincre”. Donc on note : la drague de rue, c’est chiant. Et non, ça ne fait pas plaisir, désolée de vous l’apprendre.

Drague de rue

Draguer la meuf vulnérable

 

En 37 ans d’existence donc 25 avec des seins, j’ai réalisé un truc, mmmm, intéressant. Je ne me fais draguer que quand je dégage une certaine vulnérabilité. C’est quand je suis en jogging, quand je suis rêveuse et que j’ai baissé mes défenses. Et du coup, maintenant, quand un mec m’adresse la parole pour me draguer, je flippe “merde, j’ai l’air vulnérable”. Alors ouverture des épaules, technique de sophrologie du tigre et on repart. Car la drague de rue se caractérise par son manque de sincérité neuf fois sur dix.

Un homme importune une femme dans la rue pour la draguer

Je ne suis qu'un bout de viande

 

Reprenons. Je suis dans la rue et un mec vient m’aborder. Que sait-il de moi ? Je suis dans cette rue à ce moment donné et à priori, il doit me trouver un peu jolie. Ou cherche juste à me rappeler à qui appartient la rue. Point. Et je trouve ça insultant autant pour moi que pour lui. Moi parce que manifestement, l’emballage est suffisant, on s’en fout du reste. Lui parce qu’il ne s’intéresse qu’à l’emballage. Si j’inverse les rôles, pourquoi j’irais draguer un inconnu. Il y a cet homme, bien joli, avec sa petite barbe, ses lunettes, son joli nez, tout ce que j’aime. Mais après ? D’abord, il peut être en couple donc soit il est fidèle et je l’ai juste dérangé pour rien. Soit il a une meuf mais j’ai pas forcément prévu d’être sa maîtresse, dans l’hypothèse où il serait réceptif à ma demande.

 

draguer un homme

Peut-être juste un connard

 

Mais ça, ce n’est qu’une donnée parmi tant d’autres. Peut-être que je vais lui parler à un moment où il est anxieux car il va à un entretien et se le répète dans sa tête. Peut-être est-il en colère. Peut-être est-il en train de tisser une jolie histoire dans sa tête dans laquelle je n’ai rien à faire. Peut-être qu’il est triste car il a appris une mauvaise nouvelle… Je ne connais pas son état psychique et peut-être que je vais tomber au pire moment et qu’il n’a juste pas envie de subir ça juste parce qu’il est sorti de chez lui et que je l’ai trouvé fort appétissant. Mais ce n’est pas tout. Peut-être qu’il est raciste et/ou homophobe, peut-être qu’il est violent, peut-être qu’il est macho. Peut-être qu’il a des passions dans la vie qui ne me parlent pas du tout, peut-être qu’il adore Hanouna et les anges de la téléréalité, peut-être qu’il écoute Jul en boucle chez lui... Ce que j’aime chez un homme, c’est pas juste sa jolie frimousse et son petit cul frétillant, non. C’est un tout. Alors ce joli garçon, au pire, je le prends en photo mentale et je m’en servirai pour l’un ou l’autre de mes romans. Ou je l’oublierai parce que ce n’est pas très important.

Hernano Fuentes Sense 8 Alfonso Herrera

Exploiter la vulnérabilité

 

Ensuite, la drague dans la rue, ça me rappelle ma vulnérabilité, comme je disais. Ça me rappelle ma période de journaliste en plein micro-trottoir. Lors de mon premier micro-trottoir, je me jetais à la tête de tout le monde avec un taux de réussite très bas. Alors j’ai changé mon fusil d’épaule et j’ai pris des gens immobiles. Ceux qui attendent, ceux qui rêvent, ceux qui traînent… Bref, ceux qui sont peu attentifs et n’oseront me dire non car ils ne sont pas en action. Une femme l’avait souligné lors de la vidéo indigne de Guillaume Pley en mode PUA “abuser de la confiance des femmes pour les embrasser de force”, vous savez, le “je peux te poser trois questions ?”, cette femme avait relevé que les femmes abordées étaient soient assises soit au distributeur automatique donc pas en position de s’enfuir… donc en position de vulnérabilité.

Draguer dans la rue

 

L'espace public est masculin

 

Et puis, ça me rappelle assez méchamment que dans la rue, je suis pas dans mon espace, j’en ai déjà parlé. En gros, je pénètre un univers masculin, je suis priée d’être disponible, souriante et polie sinon, j’aurai droit à ma petite insulte.

Des hommes matent une femme qui passe

Tel un chewing-gum sous ma chaussure

 

Mais surtout, le point chiant de la drague de rue, c’est le non. Jean-Michel dragueur décide de m’aborder, je lui indique que je suis pas intéressée. Quand j’entends, je suis devenue une ninja du j’entends pas… Mais pas de bol, je suis tombée sur la version lourde qui veut savoir pourquoi je ne veux pas aller boire un café avec lui. T’as déjà un mec ? Pas grave, je suis pas jaloux, mouarfffff ! Tu vas bosser ? Ben donne ton numéro, je t’appelle et on se voit après ! Je vous jure, c’est insupportable. Parce que le coup du petit copain, ça m’est arrivé de le sortir en période de célibat par politesse. Parce que oui, j’ai pas forcément envie de dire cash au mec que sa gueule me revient pas et que j’ai pas envie de prolonger cette conversation, merci, au revoir. C’est quand même pas dur à piger, il me semble. “Oui mais si le mec était beau, tu dirais pas ça…”. Non, un mec qui me colle et me saoule, je vois pas trop comment je pourrais le trouver autrement que flippant, en fait…

Krysten Ritter - Jessica Jones

Laissez-nous vivre notre vie

 

Bref, vous trouvez une femme bien mignonne dans la rue et vous pensez que c’est la mère de vos futurs enfants ? C’est votre droit. Elle vous envoie quelques regards invitant à la conversation ? Vous pouvez lui répondre. Sinon, foutez-nous la paix. Parce que si vous avez le droit de nous trouver jolie, nous avons le droit de ne pas être intéressées. Et de ne pas prendre d’insultes pour ça ou de devoir se justifier pendant dix bonnes minutes alors qu’on a franchement autre chose à faire. Même si on n’a rien à faire, d’ailleurs. Ce sera, quoi qu’il en soit, plus sympa que de commencer à flipper parce qu’un mec nous colle et qu’on ne sait pas s’il va pas finir par nous agresser parce qu’on n’a pas envie de lui.

Femme agressée dans la rue

Et pour les chouineurs qui comprennent pas la différence entre jeu de séduction et harcèlement, le projet crocodile vous expliquera ça très bien, hop !

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