Je ne me souviens plus bien de cette période. J’étais épuisée. Maëlle est à bout de nerf, harcelée par Vanessa qui lui écrit des mails dégueulasses. Je les ai lus, lesdits mails, c’était… On essaie de voir comment se coordonner mais son médecin finit par l’arrêter : elle a perdu du poids alors qu’elle est déjà très mince et son dos la fait terriblement souffrir. Je ne suis cependant pas seule, mon autre collègue, Loïc, subit lui aussi les foudres de Vanessa.
En réalité, il y a une scission dans l’équipe : d’un côté, Maëlle, Loïc et moi, de l’autre, Vanessa et Ludovica, sa chouchoute. Loïc, qui était très ami avec Ludovica, supporte un peu mal cette nouvelle amitié, d’autant que la jeune fille prend le melon et devient franchement odieuse, méprisant Maëlle qui a longtemps été sa tutrice d’alternance. Elle commence même à me donner des ordres, avec l’aval de Vanessa, évidemment, qui en fait son bras droit. Pourtant, la paire n’obtient pas vraiment de bons résultats…
Car c’est la saison des pitchs. Pas les petits pains fourrés, nan, les appel d’offres. Le premier, je monte dessus car j’avais réalisé un premier travail d’audit sur ce client, déclenchant justement l’appel d’offre. Je suis débordée, littéralement. Je gère seule le dossier, Vanessa ne venant m’engueuler que pour me dire que ma pres n’est pas moderne (je n’ai toujours pas compris ce qu’elle voulait). Je me tape réunions sur réunions, je bosse le soir, le week-end. Je préviens Vanessa qu’à un moment, ça va coincer… Parce qu’en plus de ce pitch, j’ai désormais trois comptes en community management plus les deux de Chloé une semaine sur trois. Soit cinq sur un pôle qui en détient sept… et encore, le petit dernier, c’est moi qui ai écrit une simili stratégie et le premier planning édito… Bref, je suis au four et au moulin. Ce pitch se passe relativement mal car je passe énormément de temps dans des réunions “regardons ce qui a été fait depuis hier”, Vanessa ne vient à aucune et ne veut pas s’en mêler, ne s’entendant pas avec la directrice conseil (qui est effectivement du genre tyrannique). La pres a lieu, Vanessa ne parle même pas durant les deux heures de présentation. Je donne mes dernières forces, on est brieffés sur une enveloppe supplémentaire. La réponse tarde un peu car je dois brieffer un studio créa et je ne sais pas faire, même si je suis bien aidée par notre directeur artistique. Heureusement, les vacances approchent.
Juste avant de partir, je boucle mes dossiers en speed, je fais deux ou trois conneries qu’elle fait passer en mode “ahlala, t’es toujours stressée avant tes vacances”. Je lui fais remarquer que le problème est plus ma charge de travail mais ce n’est pas un sujet qui l’intéresse. Parallèlement à ça, les résultats de pitchs tombent : le mien est gagné, celui de Ludovica et Vanessa, perdu. Sachant que la paire a perdu un gros client fin décembre (nous étions l’agence sortante, nous n’avons pas passé le premier tour). Je ricane un peu. D’ailleurs, je fais un peu ma garce, je sème mes graines à droite, à gauche : a-t-on déjà vu une slide rédigée par Vanessa (non) ? A-t-on gagné un nouveau client par son travail (non) ? Elle est très douée pour usurper le travail des autres. Un exemple qui m’avait marquée : nous étions en pause avec la majorité de l’équipe et elle se plaint d’un mec qu’elle savait perdu pour sa cause. “Non mais sur ce dossier, j’ai dû réécrire toutes ses propositions de posts Facebook car elles étaient nulles”. Tu as dû réécrire ? TU ? Non parce qu’à qui elle avait demandé ce travail ? Moi. C’est moi qui l’avait fait mais tout était passé via messenger, pas de traces. Ce jour là, j’ai froncé les sourcils mais j’ai rien dit, nous étions amies à l’époque. Quelle bonne poire, oui !