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Citizen Bartoldi

Blog d'une citoyenne qui rêve d'une société solidaire et égalitaire mais qui voit ce rêve s'éloigner chaque jour un peu plus

Aya Nakamura ou comment on est de vieux cons

Publié le 31 Décembre 2020 par Nina in Pop culture, Féminisme, Ok boomer

Et pas mal misogynoirs, aussi. Alors parmi les choses qui me caractérisent, ce sont mes lacunes sur la pop culture actuelle. J’ai plus la télé, j’écoute pas la radio donc autant vous dire qu’il y a une foule de jeunes artistes que je ne connais que de nom et encore. Et même, l’actualité des artistes que je connais, j’ai quelques années de retard. Je ne le vis pas si bien que ça car je considère que tout ça fait partie de la culture. Qu’on aime ou pas, c’est autre chose. Mais voilà Aya Nakamura, cette jeune artiste Noire que l’on adore détester. Surtout les hommes blancs. Oh tiens, en voilà un sujet pour moi. 

Aya Nakamura
Je connaissais de nom...

Je vais diviser cet article en deux parties. La première va parler du travail d’Aya puis je reviendrai sur mes énormes soupçons de misogynoir car y a un truc bien crasse chez les haters de cette pauvre Aya. Je vais pas vous mentir, Aya Nakamura, j’ai connu le nom bien avant de connaître la musique. Un peu comme Angèle que je n’ai jamais écouté et dont je connais le travail par L.E.J, finalement. Depuis j’ai écouté et je suis pas fan. Réaction numéro un : oh non, y a du vocodeur ! Réaction numéro deux : je comprends rien à ce qu’elle dit. Alors déjà pour le vocodeur, pas tant que ça en réécoutant mais surtout… ah mais voilà, j’ai basculé dans le camp des vieilles connes.

Vieille dame
J'ai jamais aimé le vocodeur...

Quand j’étais ado ou jeune adulte, ma mère avait du mal avec certains morceaux que j’écoutais. Jamais mes parents ne pourraient écouter du Britney une chanson en entier. Et je vous parle de Britney bonne époque, genre Toxic, Slave for you, one more time… Et j’imagine que ma grand-mère n’aimait pas forcément tout ce qu’écoutait ma mère… même si la seule chose que je sais de ses goûts de jeunesse, c’est qu’elle écoutait Julien Clerc parce qu’elle le trouvait trop beau. Ok, rien ne change, c’est chou. Moi, depuis 98, alors que j’étais encore jeune, je me demande comment les gens peuvent apprécier Believe de Cher tellement la voix est trafiquée. Et j’ai traversé ma vingtaine en fronçant des sourcils quand j’entends cette espèce de voix métallique cheloue. Des fois, ça passe. Je suis pas toujours fan de Daft Punk mais l’aspect métal de la voix s’intègre parfaitement dans le processus créatif, par exemple. Idem pour Air, Nightcall de Kavinsky pour ceux qui me viennent spontanément en tête. Mais plus j’avance dans ma trentaine, moins je comprends. Jusqu’à chouiner dès qu’une voiture vitre ouverte passe à côté de moi en écoutant cette nouvelle scène du rap avec un abus total de vocodeur. Oui, je parle de Jul, par exemple. Alors que Maître Gims, c’est pas ma came du tout (même si sapé comme jamais me fait rigoler) mais je n’ai pas une réaction épidermique d’un point de vue auditif. Je reconnais qu’il a un bel organe même si son côté over dramatique dans la voix me fait un peu rigoler. Je rigole beaucoup, oui.

Maitre Gims
Une jeune femme de son temps

Donc quand Aya Nakamura est arrivée, autant vous dire qu’il était téléphoné que ce serait pas ma came. Et franchement, c’est pas grave. J’ai fait des blagues à base de “y a pas moyen Dja Dja” alors que je n’avais strictement jamais entendu la chanson. Et j’ai jamais fait la démarche. Ca a fini par arriver à mes oreilles et j’ai été déçue de pas aimer, en vérité. Même si franchement, ça passe, ça ne m’écorche pas les oreilles. Après, j’aime jamais trop les “ahahah yeah yeah yeah” mais ça n’est pas spécialement sa marque de fabrique, tout le monde le fait. Bref Aya et moi, c’est un peu compliqué… et c’est normal. Car je suis une jeune quadra, désormais, et je n’ai plus les codes. Quand j’étais jeune ado, en classe, on avait étudié “Laisse béton” de Renaud en français et la prof nous avait expliqué que quand la chanson était sortie, ça avait fait grand bruit car les moins jeunes de l’époque avaient trouvé ce langage hérétique et scandaleux. Oh, wah, comme pour Aya. Les vieux cons prétentieux et pédants que nous sommes aiment se gausser du vocabulaire d’Aya Nakamura mais, hé, c’est juste une juste femme de son temps. Et nous, nous sommes ringards. C’est l’ordre de la vie.

Aya Nakamura, une femme de son temps
Pourquoi on adore Jul et on déteste Aya ?

Alors à la limite, que vous n’aimiez pas la musique d’Aya Nakamura, j’avoue que je m’en fiche. Chacun ses goûts musicaux et comme je suis la fille qui écoute Starmania en boucle depuis environ 30 ans, je ne pense pas avoir de leçons à donner à qui que ce soit. D’ailleurs, peut-on vraiment donner des leçons de bon goût en musique ? Encore une histoire de bon goût bourgeois cher à Bourdieu. Bref, chacun sa came. Là où je tique, c’est dans la différence de traitement entre Jul et Aya Nakamura. Alors je vais être transparente : je déteste Jul. Je déteste le vocodeur donc déjà, voilà, mais ses chansons sont nases, ce sont des samples pourris et les paroles, les paroles… je résume “je suis un bonhomme, respectez-moi et je baise les meufs”. Et ce mec est encensé. Il était invité sur France Inter, l’autre jour, je sais qu’il est passé plusieurs fois sur France 2. Et je me retrouve avec mon neveu de 8 ans qui hurle “lalala, y a de la weed, y a de la teu-cha”. Pardon ?

Un enfant chante
Le mâle blanc pseudo viril vs la femme noire qui s'assume. Qui s'en prend plein la gueule ?

Alors j’aimerais comprendre. D’un côté, on a un jeune Blanc qui chante son seum à longueur de chanson et nous explique qu’il baise à tour de bras et que tout le monde le respecte dans le tier-quar car c’est un bonhomme. On l’encense car on fait tout tout seul et qu’il est hyper productif. Il a un vocabulaire très peu développé et musicalement, c’est… Mais lui, on l’adore. Alors que de l’autre, on a une jeune femme qui explique qu’elle n’a pas besoin d’un mec pour être quelqu’un et qui rappelle aux hommes qu’ils doivent la respecter. Oh, waaah, horrible. Sinon, elle est autrice-compositrice et interprète, sort un album presque tous les ans. Elle est reconnue internationalement, elle est quand même l’artiste féminine francophone la plus écoutée sur Spotify en 2020 mais non, on l’assassine car elle n’a pas apprécié que Nikos écorche son nom. C’est à dire que, désolée, mais même si elle ne vous plaît pas, elle n’est pas n’importe qui. Un présentateur/journaliste aurait écorché le nom d'un écrivain ou d'un scientifique, vous auriez réclamé qu'ils soit brûlé en place publique. Vraiment "amusant" cette différence de traitement.

Aya Nakamura
Une femme Noire réussit, pourquoi ça vous ennuie ?

Perso, je vous en veux. A vous qui étrillez cette fille en permanence mais “adorez Jul”, le mec qui apprend à mon neveu que les femmes ne sont pas vraiment dignes d’intérêt et encore moins de respect. Tellement qu’elles sont désignées par leur appareil génital. Si l’une vous pose problème et pas l’autre, c’est juste que vous êtes misogynoir. Les langages et les codes évoluent, une jeune femme Noire de 25 ans a su les utiliser pour réussir et on devrait tous s’en réjouir. Après, personne ne vous force à écouter. Enfin, moi, je l’ai fait en écoutant cette chronique et franchement, c’est pas si mal. Je crois que je vais rajouter Dja Dja à ma playlist bordel sur Spotify.

PS : J'anticipe. Les comms à base de "moi je déteste les deux" qui va vous servir à vomir sur Aya Nakamura, renoncez direct. Je veux pas vous voir justifier votre misogynoir. 

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