Bien le bonjour ! Avez-vous remarqué ? Quoi ? Tous ces êtres étranges qui viennent squatter plateaux télés ou radio, colonnes de journaux... et qui viennent prêcher leur bonne parole parce que... Ben tiens, pourquoi ? Ah oui, ils sont éditorialistes. Ah, ça m'a l'air un chouette métier, ça, courir les micros pour balancer son avis sans trop faire l'effort de bosser son sujet, en balançant au mieux quelques vagues sources. Un peu ce que je fais sur ce blog, oui... Mais attendez... je suis éditorialiste, en fait !
Je suis pour la pluralité des voix. Je suis pour donner la parole, estimant que la vérité n'est pas le monopole de gens avec carte de presse (je dis ça parce qu'il faut bien un signe distinctif, j'aurais pu parler de diplôme de journaliste mais j'en ai moi-même un qui me sert à rien du tout donc...). Il y a même des gens experts dans le sujet qui peuvent être absolument passionnants. D'ailleurs, ces personnes sont souvent interrogées dans le cadre d'interviews. Le souci, c'est la prise de parole par des gens qui ont peu à voir avec la choucroute. Je vous renvoie à cette longue mais intéressante vidéo d'Usul sur ces bons clients de la télé comme BHL. Qui n'est pas le pire, certes, car en bon client de télé, on a Zemmour, par exemple. On pourrait discuter de sa télégénie (sujet qui ne m'intéresse pas même si je l'ai traité de Gargamel la dernière fois) qui n'est certes pas comparable à celle d'un BHL, à l'époque de sa superbe, ou d'un Enthoven mais il assure le buzz. Et malheureusement, aujourd'hui, on ne fait plus tant du journalisme pour informer que pour vendre.
Et on se retrouve avec pléthore de mecs qui ont zéro légitimité pour parler d'un sujet qui assènent leur vérité discutable car ils sont éditorialistes (voire polémistes dans le cas de Zemmour, c'est l'éditorialiste version "poil à gratter". Je hais cette expression qui semble légitimer qu'on dise les pires horreurs). Prenez un Christophe Barbier, l'homme à l'écharpe rouge le plus déconnecté du monde, idiot utile de la République qui teste auprès de son audience quelques idées bien réac pour voir comment ça réagit. Un institut de sondage à lui tout seul, le père Barbier. Voyons, supprimer une semaine de congés ? Oui, ok, ça passe pas... Et forcément, ça m'agace car je pense à tous ces gens qui ont fait des études de journalisme, qui ont un minimum de talent et de rigueur et qui bouffent leurs nouilles lyophilisées le soir venu tellement ils sont mal payés. Et à côté de ça, t'as tous ces connards qui vont lire rapidos la presse (vu les conneries qu'ils sortent, je pense qu'ils se cantonnent à 20 minutes ou Cnews et encore, en le lisant en diagonale) qui vont t'expliquer la vie. Non mais sérieux, je supporte pas ce type de personnalité en vrai, pourquoi on me les impose en PERMANENCE dans les médias ?
Et surtout, pourquoi eux et pas moi ? Après tout, s'il s'agit d'avoir un avis sur tout, je m'en sors pas si mal, à deux ou trois sujets près mais pour un salaire à plein de K€, aucun souci pour me forcer. Je peux même vous pondre un discours de 3 mn sans interruption sur la défaite du PSG face à Manchester*. J'ai Twitter, hein, c'est pas très compliqué de choper quelques analyses pas trop pétées et de les balancer comme si c'était mon intime conviction. On a tous le potentiel d'être éditorialistes, faut juste savoir aligner deux mots en suivant, crier un peu et s'indigner et ne surtout pas se laisser déstabiliser quand quelqu'un nous fait remarquer qu'on dit un peu de la merde.
En fait, les éditorialistes sont souvent fascinants, des modèles d'aplomb pour les Nuls. Ils parlent de sujets qu'ils ne maîtrisent pas neuf fois sur dix et t'enrobent ça dans un verbiage pompeux. Dès que quelqu'un leur fait remarquer qu'ils disent n'importe quoi, il bottent agressivement en touche. "Oui, oh vous, ça va ! On en reparle de la fois en 95 où vous avez appelé Pierre Bergé, Michel ?" ou un "Non mais monsieur, je refuse de parler avec vous, vos idées sont problématiques". Si j'avais le temps (non) et la sérénité (encore moins), je pourrais passer des heure à tout disséquer pour en faire des articles ou des vidéos. Parce que ces gens, souvent Hommes blancs cishet, ceux à qui on a appris qu'ils avaient tous les droits, n'ont aucune difficulté à ne pas admettre qu'ils racontent n'importe quoi et peuvent même pousser à jouer les pauvres victimes outragées. Je les admirerais presque si je ne les méprisais pas tant.
Alors je vous entends "oui mais attends, c'est pas toi qui dézinguait l'argument d'autorité, l'autre jour". Si, absolument mais ce n'est pas le même sujet, tout à fait. Imaginons que je sois rédac chef d'une émission lambda où nous allons parler d'une actualité brûlante sur un pays, par exemple. La bonne idée serait d'interviewer un ou deux spécialistes de la question (histoire d'assurer la pluralité des voix) pour qu'ils nous refassent une remise en contexte nous permettant de nous faire une opinion. Mais non, à la place on invite des Jean-Michel éditorialiste qui te balancent quelques faits et dates random pour faire croire qu'ils maîtrisent à peu près leur sujet. Personne ne va vraiment les contredire, surtout pas l'animateur de l'émission qui va se contenter de lever le bras pour distribuer la parole. Du coup, toi, moi, devant nos écrans, radios ou ordinateur, comment peut-on se dire que c'est de la merde si personne n'est venu immédiatement remettre la parole en cause. Comment je puis savoir que ces mecs là n'ont de légitimité que le fait d'être des bons clients de télé, pros de la petite punchline, du scandale facile ? Parce que oui, dans l'idéal, je serais bien polie d'aller vérifier l'information mais vous savez ce que c'est... On n'a jamais le temps.
Mais du coup, il faudrait virer ces gens aux avis sur tout pour les remplacer par une accumulation d'interviews ? Et le débat alors. Ah ben tiens, nous en parlerons semaine prochaine (chute prévisible)
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*J'ai écrit cet article y a très longtemps, j'ai juste manqué de temps pour le publier, cheeeeeh