Petit matin. Alors que le soleil tarde de plus en plus à se lever, je quitte mon immeuble pour me rendre à mon travail. La rentrée est dure, d’autant plus dure que je dois couvrir la moitié de mon visage d’un bout de tissus. Sinon, c’est 135 € d’amende ! Et j’aimerais mieux utiliser mon argent pour autre chose, voyez. Genre m’acheter de nouveaux sous-vêtements ou un petit APN wifi vu que j’ai cassé l’appareil de mon téléphone… Et puis moi, la police, moins je lui parle, mieux je me porte. Surtout que, comme je m’y attendais, on a bien pu compter sur eux pour abuser de la verbalisation des mal masqués. Mais la vraie question que je me pose : pourquoi, en France, la répression est toujours la réponse à tout ?
Oh, j’ai pas besoin de creuser beaucoup pour avoir une réponse “oh bah les gens, ils font que de la merde, faut taper fort pour qu’ils obéissent.” Ah, les gens qui, mes préférés ! C’est vrai qu’en lisant les réseaux sociaux à la fin du confinement, j’avais l’impression que c’était la fête du slip dans le métro, que personne ne mettait son masque… Et pourtant, quand j’ai pris le métro, le RER, le transilien ou le tram, tout le monde était docile, à deux ou trois nez en dehors près. Mais ça, apparemment, c’est autorisé… Bref, il y a toujours un énorme fossé entre ce que je constate et ce que j’entends dans les médias. Peut-être que ce n’est que de la chance ou un biais de confirmation. Mais il me semble que les non-respects de masque que j’ai pu observer sont accidentels (étourderie). Et vu que je fais partie des étourdies malgré mes efforts (“ah oui, putain, le masque”), je vais pas trop jeter la pierre. Bon par contre, ceux qui le baissent pour téléphoner dans les transports, vous saoulez grave. Arrêtez de téléphoner en public, déjà...
Mais en France, on aime sévir. Comme un parent autoritaire qui n’a comme solution la punition et celle-ci tombe facilement. Trop. “Oui mais les masques, c’est important, pense aux soignants, aux personnes fragiles”. Ah mais je suis d’accord. Je porte le mien le plus sérieusement possible. Sauf étourderies, donc. Même si on me dit que ça marche pas trop, je me dis que ça rassure toujours les gens autour de moi, ça coûte pas tant que ça. Juste un litre de sueur du visage par jour, je dirais. Sauf que, sur le masque, on s’est quand même bien foutu de nous et pas qu’un peu. On est passés littéralement du “le masque, ça sert à rien et vous savez pas vous en servir” à “si tu le mets pas, c’est 150 €, ferme-la !” Mais… alors, peut-être que vous n’avez pas été turlupinée par cette injonction contradictoire mais pour ma part, j’en ai un peu assez du blanc un jour, noir le lendemain. Même si, pour le coup, le masque, j’étais assez pour dès le départ. Mais là, je crains un peu le côté "le masque prend le pas sur tous les autres gestes barrière et on va tous tomber malade". Genre comme dans le métro, voyez ?
Vous savez ce qu’expliquait Super Nanny aux parents dépassés ? “C’est normal que votre enfant fasse une crise, vous lui ordonnez les choses sans lui expliquer”. Et c’est là que je veux en venir. Notre cher gouvernement est un summum d’arrogance à base d’ordres stricts (mais contradictoires, donc), se posant en détenteur de la vérité absolue alors que manifestement, non. Il n’y a pas la moindre pédagogie, pas la moindre volonté non seulement de prévenir mais aussi d’expliquer qu’à l’heure actuelle, les préconisations sont faites en fonction des données disponibles. Parce que c’est ça qui m’insupporte le plus. On ne nous laisse pas d’espace pour discuter, pour comprendre. On impose et il ne nous reste que le silence.
Je parle du masque mais la passion de la répression est beaucoup plus globale. N’ayant plus la télé, je suis littéralement tombée des nues en découvrant la rhétorique de l’été “orange mécanique” mais j’ai pas loupé le sondage qui disent que les Français veulent un "vrai chef" pour diriger la France. C’est fou, ce sont souvent les mêmes qui beuglent à la liberté (de chasser, de s’exprimer aka être raciste, misogyne, homophobe et l’ensemble des phobes d’ailleurs) mais qui trouvent que les gens en ont trop et qu’on devrait les limiter. En fait, la passion de la répression, c’est exiger que tous ceux qui pensent ou agissent différemment arrêtent immédiatement. Même si ça ne menace personne…
Le prochain qui me dit que la France est le pays de la liberté, je lui fais manger son chapeau. Tant pis si ça me vaut une amende.