Tiens donc, Castex fut positif au Covid. Vous savez, le Covid, cette terrible maladie qui a tué 130 000 Français, là. Ça flambe de partout mais apparemment, c'est moins intéressant que de parler de Zemmour. Surtout depuis sa candidature. Je suis déçue, j’étais persuadée qu’il n’irait pas. Donc le Covid devient une menace de plus en plus abstraite. Avec le vaccin, on en meurt moins, c'est bel et bien devenu une grippette. Jusqu'au prochain variant. Et en attendant, ça bamboche sec dans la France d'en haut.
La seule délinquance qui dérange, c'est celle des pauvres
Il y a deux types de délinquances. Celle des pauvres, vitupérée, dénoncée à grands coups de reportages et renforcé de légendes urbaines à base de "on vit mieux au chômage qu' en travaillant". Alors ça peut être vrai dans un certain cas. Typiquement ça aurait pu être le mien : mes allocs chômage auraient sans doute été plus élevées que mon futur salaire Bordelais. Mais ça ne marche que parce que je suis une cadre trop bien payée. Trop bien payée dans le sens où mon métier ne sert à rien, hein. Je suis pas mieux payée que les autres à mon niveau… Mais vu que je suis une bonne Française de souche (pour ce que ça veut dire) ayant fait des études, mon cas n'intéressera pas Zone interdite. Car si la délinquance des pauvres est mise en scène H24, celle des riches passe sous silence. On en a eu, des scandales sur l'évasion fiscale. Panama papers, Pandora papers… un trésor de collaboration journalistique et tout ça pour quoi ? Les scandales, ils sont toujours de ce côté-là de la barrière et pourtant, ça n'intéresse personne. Les SUV et Porsche qui tuent des enfants, ça émeut peu. Le vrai problème, ce sont les rodéos urbains ! Même le traitement des violences motorisées subit la même dichotomie.
Le Covid, c'est à cause des pauvres qui font n'importe quoi
Et évidemment, pourquoi le traitement de la crise de Covid en irait autrement, hein. On s'est régalés de voir un flic faire la morale à une dame sortie au supermarché pour juste acheter du Coca. Verbalisez, verbalisez ces salauds de pauvres qui mettent mal leur masque ! Alors je ne supporte plus, personnellement, le mauvais port du masque. Ça fait plus d'un an qu'on en porte, il y a, chez certains, une mauvaise volonté manifeste de le porter correctement. Genre chez les deux-tiers de mes collègues qui n'en portent carrément plus sans que ça fasse tiquer qui que ce soit. Sauf que le souci est sans doute un peu plus macro. Les gens qui portent mal leur masque au boulot ou le métro m’angoissent car j’ai peur d’être contaminée malgré ma relative rigueur sur les gestes barrière. Mais le vrai souci, c’est que rien n’empêche mon effroyable PDG de me faire venir au bureau et donc d’être en présence de toutes ces personnes dont je ne connais pas la sérologie. Salauds de pauvres qui ne respectent pas les gestes barrière, hein. Sauf que bon, perso, j’ai beau faire attention, je bois dans l’open space donc je baisse mon masque de temps en temps pour m’hydrater ou manger. Au lieu de pleurer sur les gens peu sérieux, pleurez sur le fait qu’il n’existe aucune barrière légale à la circulation du virus. Parce que là, les chiffres explosent mais j’ai pas entendu qu’il fallait revenir au télétravail. Et si ça a été dit, je peux vous garantir en fonction de l’affluence dans le RER que c’est pas suivi.
Aucune volonté d'empêcher la cinquième vague
On nous parle donc d’une maladie peu jugulable et que de toute façon, si les chiffres sont dégueus, c’est bien la faute des antivax bas du front et du relâchement des gestes barrière. Certes. Cependant est-ce que l’on peut parler des comportements complètement hors sol de ces pseudo élites qui nous gouvernent. Hé oui, c’est là que je voulais en venir depuis le début, tatatan ! Donc notre 1er Sinistre a été contaminé. Oh bad, ça arrive. Sauf que quelques jours seulement avant d’être détecté positif, c’est parti pour les très longs serrages de mains, les échanges vocaux à 2 cm du visage. Non mais déjà, hors pandémie, respecte la sphère d’intimité, gars, tu m’angoisses. Mais là, t’es juste une bombe bactériologique avec l’accent catalan. Résultat : une douzaine de maires contaminés. Oups.
La maladie, c'est pour les pauvres
Et je trouve cette histoire particulièrement symptomatique de ce sentiment d’impunité des plus éliteux d’entre nous. A coupler avec les dîners clandestins. Ces personnes ne nous jettent pas l’os des antivax à ronger pour vivre leur meilleur vie sans nous. Non. Ils agissent ainsi, en se dispensant des gestes barrière basiques parce qu’ils se pensent au-dessus. De la mêlée mais surtout de la maladie. Vous vous souvenez du choc à chaque fois qu’une personnalité est décédée du Covid ? Dibango, Christophe mais surtout Devedjan ou Goasguen. Oui, des députés sont morts du Covid. Quand Devedjan est tombé, je me souviens d’une réaction unanime de “Alors ça touche tout le monde”. Oui, évidemment. Mais pourquoi ces morts là nous ont choquées plus que d’autres ? Parce que la maladie n’est pas censée toucher l’élite. Pas ce genre de maladie, du moins. Le cancer, ok, ça n’épargne personne et ce n'est pas quelque chose qu'on "attrape". Mais là, c’est une maladie de prolo, de gens qui ne font pas attention. Une maladie de plèbe. Alors on va demander à la plèbe de se confiner et de se taper le coude pour se dire bonjour tandis qu’on secouera la main d’une jeune femme pendant deux minutes car, hé, tout ça ne nous concerne pas.
En attendant, c’est sûr que si, eux, ça dégénère, ils auront accès à une qualité de soin qui n’existe plus pour la plupart d’entre nous. La France a deux vitesses à tous les étages de la pandémie.