Le pouvoir woke est un pur fantasme

Ca faisait longtemps que j’avais pas parlé du pouvoir woke imaginaire. Celui qui pousse je ne sais qui à interdire telle oeuvre. Oeuvre qui n’est en général pas du tout interdite, soit dit en passant. Récemment, j’ai lu une déclaration de Jennifer Aniston se plaignant qu’on ne pouvait plus rien dire, bla bla bla. Alors vu que j’ai vu passer ça sur Facebook, je ne suis pas certaine qu’elle ait vraiment dit ça. Mais si elle a dit ça, ça m’agace un brin. Parce que je suppose qu’elle parle de Friends et vu qu’on voit la série environ partout, je situe pas ce qu’elle veut dire ici. Et la mort de Matthew Perry rappelle qu'aimer Friends n'a rien de sulfureux ou honteux. Ah, encore une panique antiwoke ?

Personne ne veut cancel Friends

Bon, on va crever l’abcès Friends une bonne fois pour toute. Personne ne veut faire disparaître la série. Personne. Cependant, oui, la série n’est pas parfaite, notamment sur certains sujets. Genre la transidentité. Le dire et expliquer en quoi c’est problématique, ce n’est pas de la cancel culture. Même les auteurs de la série ont admis s’être plantés sur le sujet. Parce qu’au début des années 2000, ce n’était pas un sujet souvent évoqué et il était facile de mal faire. C’est un peu plus compliqué à laisser passer sur l’homophobie ordinaire de la série (autour du personnage de Chandler). Même si on pourrait se dire que c’est une façon de se moquer d’un prétendu virilisme des personnages, notamment l’arc sur la sieste de Joey et Ross. Même si tous les autres les jugent alors que… y a quoi ? Par contre, sur la grossophobie sur Monica, là, je vois pas d’autre grille de lecture. Surtout quand on sait qu’une des actrices se sentait mal dans sa peau et “énorme” par rapport aux deux autres. Certains reprochaient à la série d’être d’être Wasp également avec uniquement des acteurs et actrices blanches. 

Souligner les défauts, ce n'est pas vouloir censurer

Sauf que Friends est une série des années 90, beaucoup de ses défauts sont ceux de leur temps et tout le monde en est conscient. Souligner que Ross était toxique avec Rachel ne veut pas dire qu’il ne faut plus regarder la série.  Juste qu’il ne faut pas croire que le couple Ross et Rachel est un exemple d’épanouissement. Grosse nuance. Personne ne parle de supprimer de vieux shows issus d’une société qui n’avait pas les débats qui nous traversent aujourd’hui. Vous voulez regarder Friends. Ok, allez-y. Je l’ai pas vu depuis des années, depuis que je n’ai plus la télé, mais je pense qu’il s’agit toujours d’une des meilleures sitcoms des années 90. Même si je suis moins fan de la dernière saison (sauf le mariage de Phoebe) et que je déteste la majorité des épisodes de Thanks giving. Notamment celui avec Brad Pitt où y a une trop longue vanne sur le fait que Brad a fait croire au lycée que Rachel était en réalité un homme parce qu’il la détestait. Oui, à l’époque, bla bla bla…

Vos vannes oppressives ont des conséquences

Alors peut-on vraiment ne plus rien dire et ne plus rire de rien ? Une société évolue. Grâce aux réseaux sociaux, la parole s’est démocratisée et pas mal de personnes qui s’en prenaient plein la gueule dans l’hilarité générale ont enfin pu faire entendre leur voix. Non, ce n’est pas drôle d’être stigmatisée de par son origine, son orientation sexuelle ou son poids. Ca a des conséquences dans la vraie vie. Déjà pour trouver du travail. Les discriminations à l’embauche des personnes racisées, c’est une réalité. Idem pour les personnes grosses qu’on adore caricaturer comme manquant totalement de volonté. Elles sont pas capables de maigrir alors faire leur job ? Dans Friends, la Monica grosse est carrément stupide. Bien plus que la Monica mince qui, elle, n’est qu’inculte. On a besoin de représentations positives, pas de se faire allumer parce que dans les séries, les stéréotypes négatifs sur ce que l’on est sont catastrophiques. Car ils s’ancrent dans l’imaginaire collectif. Les gros sont comme-ci, les Noirs comme ça. Après, si vous n’êtes pas capable de faire d’autres vannes que de taper sur des minorités en rebalançant des clichés éculés, le problème n’est pas la cancel culture ou les woke. Juste votre médiocrité.

Renouvelez vos vannes

Conclusion : le “wokisme”, cet espèce d’épouvantail hybride, n’est pas une menace sur une série ancrée dans les 90s. Non. Mais on est en 2023, presque 24, et il serait peut-être temps de se dire qu’on peut faire bien mieux en terme d’humour que de taper sur les mêmes avec des stéréotypes non fondés et qui peuvent blesser dans “la vraie vie”. Parce que oui, les gens sont souvent bêtes et méchants et si tu leur fournis des blagues pour blesser autrui, tu crois qu’il va se passer quoi ? On aimerait avoir droit à plus de maturité et de tolérance. Si c’est ça, être woke, le fait que vous vous déclariez contre en dit beaucoup sur vous. Et ça dit pas du bien.