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Citizen Bartoldi

Blog d'une citoyenne qui rêve d'une société solidaire et égalitaire mais qui voit ce rêve s'éloigner chaque jour un peu plus

“Moi, le RN, il ne me menace pas”

Publié le 21 Juin 2024 par Nina in Autoritarisme, La menace de l'extrême droite, Au-dessus de la mêlée

Que tu crois. Bon, allez, on est partis pour un nouveau tour sur le “si tu crois que le RN est la solution, c’est que t’as pas tout compris”. Je ne m’étendrai pas sur le “mais on sait pas, on n’a jamais essayé”. Si, déjà. Et si tu trouves que 1940, c’est trop loin pour juger, je te renvoie à ce qu’il se passe en Argentine actuellement. Cependant, c’est rigolo le côté “1940, c’est trop loin” suivi de la ritournelle des morts du communisme sous Staline. Mais bref, aujourd’hui, pas de leçon d’histoire, juste un petit point sur le fait que certains se croient à l’abri du RN. Tut tut.

Drapeau français déchiré

Je possède pas mal de totems d'immunité

Si le RN prend le pouvoir le 07 juillet, à priori, je fais partie de cette frange des Français qui ne serait pas trop mise à mal par ce nouveau rebondissement de la vie politique française. Déjà, je suis blanche. Tellement de souche que sur l’arbre généalogique de ma grand-mère paternelle qui remonte au XIIIe siècle, on était déjà français. Bon ok, mon ancêtre le plus vieux qu’on ait retrouvé s’appelait Jamon de la Oliveira, nom de famille qui a évolué en De l’oliveraie. Mais quand même. Je veux dire, moi, mon péril perso, ce ne sont pas les arabes, c’est une éventuelle consanguinité. Certes, mon nom de famille vient d’une déformation d’un mot catalan mais mon père vient de la Catalogne française. Vous savez, Perpignan, une ville dirigée par… le RN. Yay. Bref, je suis blanche de souche, plutôt CSP+, en couple hétéro, salariée et valide. Un bon bingo. Alors certes, je suis une femme et y a un droit qui risque d’être rapidement mis à mal mais à 44 ans, il y a de fortes chance que je sois ménopausée avant que l’avortement soit interdit. Donc sur le papier, peu importe qui gagne le 07 juillet, ma vie ne sera menacée sur aucun aspect.

une femme française cliché

Les droits des femmes vont s'en prendre plein la tronche

Sur le papier, j’insiste. Bon, j’ai déjà souligné qu’en étant femme, ça risque de ne pas être si joyeux pour moi. On pense immédiatement au droit à l’avortement puisque c’est le premier qui saute dès que l’extrême-droite arrive au pouvoir. “Ah mais nous, on l’a inscrit dans la constitution”. Certes mais le droit et la réalité… Aujourd’hui, il est déjà compliqué d’avorter alors imaginez ce que peut faire un gouvernement hostile à ce droit. On va allonger les procédures, diminuer le délai légal. Diminuer les subventions aux hôpitaux pratiquant l’avortement… On peut le garder autorisé à partir du moment où on le rend impossible. On imagine sans peine qu’on va faire sauter tous les dispositifs sur les égalités homme-femme parce que les quotas, tu comprends… Le congé paternité, on oublie. Bon et la lutte pour le congé menstruel, c’est terminé, remballez. 

Le droit à l'avortement menacé

Ciao les services publics

Et puis après, qu’est-ce qui va sauter ? Contrairement aux discours, le RN est un parti farouchement bourgeois donc niveau politique économique et sociale, il n’y a aucune raison qu’ils ne continuent pas la politique de Macron. Ils vont démanteler pièce après pièce tout ce qui constitue les services publics. Bye la sécurité sociale, les indemnités chômage, l’éducation nationale, l’hôpital public. Ils ont en cible principale le service public audiovisuel qui serait une sorte de repaire de gauchiasses sales et wokes. On tousse un peu quand on voit la réalité des faits mais passons. On pourrait se dire que, de toute façon, l’audiovisuel public est déjà gangréné par des Macrolâtres type Nathalie St Cricq, Sibyle Veil... Que ce n’est pas une si grande perte. Si vous voulez mais vous avez bien compris que tout ce que ce parti identifie comme “gauchiste” est voué à disparaître. Ecoutez Pascal Praud, vous allez avoir une liste précise. Et je ne parle même pas de la guerre contre les syndicats. 

les syndicats en France

Tout va bien jusqu'au pépin

Mais moi, ça va. J’ai de l’argent de côté donc en cas d’hospitalisation, j’aurai qu’à aller en clinique privée. Je pourrai mettre mes enfants imaginaires dans le privé. J’ai pas tant besoin de la sécu parce que j’ai la santé et j’ai un emploi alors les indemnités chômage, je m’en fiche un peu. C’est vrai. Sauf qu’on n’est jamais à l’abri d’un accident de vie. Déjà, l’emploi. J’ai perdu un job l’an dernier juste parce que ma ligne excel n’était pas fameuse. Etais-je responsable de mon taux d’inoccupation élevé ? Non car je ne suis pas commerciale, je ne vais pas chercher les contrats. Contrats qu’on ne décrochait pas suite à des décisions prise par la direction qui voulait chasser la baleine alors qu’on n’arrivait pas à choper une sardine. En gros. J’étais en période d’essai et j’ai rebondi. Mais dans l’écrémage, il y avait au moins deux quinquas avancés qui étaient dans la boîte depuis plus de dix ans. Et là, le rebond, il s’annonce compliqué. Pas pour rien que la question du chômage des seniors est très complexe et souvent balayée par les politiques.  Donc même en étant cadre, plutôt bien placé dans la hiérarchie, et bien payé, le chômage, ça peut arriver et plus vite qu’on ne le pense. 

Le chômage des seniors

Imagine, tu te niques le genou ?

Et que dire de la santé ? J’ai une fable horrifique perso : je vais chez le médecin pour un petit truc qui m’embête et, surprise, c’est un cancer et je vais mourir. C’est arrivé à l’associé de mon père. Un examen médical pour contracter un gros prêt. Oups, cancer du foie. Un an et demi plus tard, il n’était plus là. A peine la quarantaine. Je parle maladie mais il y a les accidents de la vie, aussi. Par exemple, vers la fin des années 2000, ma mère n’a quasiment pas travaillé pendant un an. Tout commence par un arrachage des ligaments croisés au ski en 98. Fin 2000, donc, il est temps d’opérer pour tirer les ligaments de la cuisse vers les genoux. Il peut y avoir des complications mais c’est rare, t’inquiète. Devinez quoi ? Elle les a eues. Des adhérences au niveau du genou. Une impossibilité de marcher correctement. Un mal de dos chronique dû à sa difficulté à marcher. Et quand elle sort enfin de tout ça, sa mère décède et elle tombe en dépression. Quasi un an sans travailler.

Arrêt maladie

Oublie la santé mentale

La dépression, d’ailleurs, parlons-en. Lors d’une réunion très houleuse (très très) avec notre nouveau PDG toxique à souhait et très dans le “mais de toute façon, les gens ne veulent plus travailler”, la conversation a dévié sur les arrêts maladies. “Non mais Machine, elle aurait pu faire carrière chez nous mais elle s’est faite arrêter”. Notre représentant CSE :”Non, elle ne s’est pas faite arrêter, c’est le médecin qui a pris la décision de l’arrêter”. “Oui, oh bah, vous savez, il y a arrêt maladie et arrêt maladie. Ceux pour des ligaments croisés, ils sont incontestables mais les autres”. Bon, autant vous dire qu’à partir de là, ça a été terminé, révolution dans la salle. Mais si on peut se dire que mon boss est une pelle à merde, son discours n’a rien d’inédit, de jamais entendu avant. Y a qu’à voir le discours ambiant sur les arrêts maladie “trop nombreux”, la difficulté à faire reconnaître le burn-out comme maladie professionnelle. Vous pensez être à l’abri mais avec un gouvernement très libéral, vous croyez qu’il va vous arrivez quoi si vous chutez ? Alors oui, ça arrivait déjà sous Macron, je suis bien d’accord. Mais ça ne va pas s’arranger.

Burn-out

Tu te crois immunisé aux accidents de la vie ?

Et puis que dire des accidents de la vie. Hé oui, par définition, un accident, ça ne se prévoit pas. Petit bilan 2023 de la sécurité routière : 1877 morts, 7600 blessés graves. Selon la fédération française des accidents domestiques, ceux-ci causeraient 20 000 décès par an et 500 000 hospitalisations. Quelle audace de croire qu’on ne sera jamais concerné par tout ça, que la vie sera un long fleuve tranquille ou rien ne pourra nous toucher gravement. Le problème avec le RN et ses avatars, c’est qu’ils n’aiment pas les fragiles. Sauf qu’on est tous à un revers de la vie de se retrouver affaibli. Fragilisé. Refuser la solidarité pour les autres, c’est facile quand on est sur les hauts étages de la pyramide. Ou qu’on se croit en haut de la pyramide parce que je suis prête à parier que vous n’êtes pas si bien placés que ça. Mais vous ne pourrez jamais être certains de ne pas en avoir besoin. Même si vous êtes blindé de tunes. Les chutes spectaculaires, ça existe. 

grosse chute

Moi, je ne serai jamais embêté par l'autoritarisme

J’admire ceux qui pensent que quel que soit l’autoritarisme du pouvoir en place, ses orientations politiques, ils seront à l’abri de la faux qui va toucher les plus pauvres, les plus précaires. Qu’ils pourront se sortir sans encombre d’une politique ultra-libérale qui vire de plus en plus à un “chacun pour sa gueule”. Bien sûr que certains s’en sortiront. On l’a vu avec ce septennat macroniste : les riches sont encore plus riches. Les autres, par contre… On sait que certains se sentent toujours à l’abri de tout, capable de tout faire sans dommage. Les darwin awards regorgent de gens comme ça, d’ailleurs. Ceux qui conduisent à une vitesse folle sur les petites routes car ils savent piloter, tsé. Tellement que certains finissent dans des platanes ou dans des fossés. S’ils se crashent tous seuls, ma foi, tant pis. Le problème, c’est qu’il y a souvent quelqu’un, en face… 

Lamborghini pulvérisée

Rester toujours méfiant

Bref, méfiez-vous de ceux à qui vous donnez le bâton de berger. Ils pourraient vous frapper bien plus vite et bien plus fort que ce que vous croyez.