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Citizen Bartoldi

Blog d'une citoyenne qui rêve d'une société solidaire et égalitaire mais qui voit ce rêve s'éloigner chaque jour un peu plus

J’arrête l’actu

Publié le 17 Octobre 2019 par Nina in actualités, fake news, les médias, FOMO

 

En ce moment, j’ai du temps vu que je croule pas sous le taf donc je réfléchis. Beaucoup. Trop sans doute mais peu importe. Comme je suis en train de m’imaginer une nouvelle vie de coach de vie ou je ne sais quoi, je regarde pas mal de vidéos sur le sujet, notamment celle d’Esther sur ce qu’elle a changé dans sa vie...et notamment le fait de ne plus suivre l’actualité.  Ma première réaction ? Pfff, c’est limite irresponsable. Ma deuxième réaction ? Et en même temps, est-ce que c’est pas la meilleure façon de me sortir de mes angoisses du quotidien ? Est-ce que l’actu répond à un besoin fondamental, est-ce que savoir ce qu’il se passe dans le monde quasi en instantané me fait du bien. NON, NON, NON.

Une personne lit les actualités sur son smartphone en sirotant un café

Dans ma prime jeunesse, je voulais être journaliste. Comme je baignais dans un milieu petit bourgeois de province, je pensais que s’informer, c’était regarder le JT de France 2 tous les soirs et zieuter la Dépêche du midi et j’étais parée. Bon en vrai, pas du tout mais j’ai gardé cette mythologie comme quoi il fallait être au courant de tout, tout le temps. Avec l’arrivée des réseaux sociaux et des smartphones, je suis devenue un pur cliché de FOMO. De quoi ? FOMO ou Fear of Missing Out soit la peur de manquer quelque chose. Je devais être au courant. A une époque, je regardais même les infos en continu jusqu’au jour où j’ai entendu un mec sur un plateau télé expliquer que l’attentat de Boston qui venait d’avoir lieu était peut-être dû au Tea Party parce qu’Obama était Noir. J’ai démonté les chaînes d’info en continu, très partiellement je l’admets, et je n’ai de toute façon plus la télé. J’ai bien saisi tout le caractère anxiogène de ces chaînes là, j’en parlais donc en pinçant le nez mais… mais c’est toute l’actu qui marche pareil, non ?

Les chaînes d'info en continu rendent addict

Je me demandais donc s’il était possible d’évacuer l’actu, la news, de ma vie. Ca ne sous-entend pas que je m’isole du monde mais je me coupe totalement de l’immédiateté. Car c’est une putain d’usine à fake news. Quand j’ai commencé à envisager la rédaction de cet article, je pensais broder autour de l’attaque de la préfecture de Paris où chaque nouvelle info contredisait la précédente… mais depuis, j’ai quand même eu LE cas qui m’a fait penser que je devais vraiment me couper de ce bruit permanent. Oui, je parle évidemment de la (non) affaire Xavier Dupont de Ligonnès, what else ? Quel fiasco. Je me couche vendredi soir, ébahie qu’on ait enfin mis la main sur ce mec et un peu consolée sur le fait qu’il allait payer pour ses crimes et le samedi “ah non, pardon, c’est pas lui”. Le Parisien a fait un mea culpa intéressant pour raconter comment on en est arrivé là, je ne poursuivrai pas plus sur cette histoire. Mais cette obligation de publier les infos en temps réel, sans vérification parce que sinon, le voisin va nous “piquer le scoop”, vraiment… et même au-delà de ça, quel stress ! En début d’année, j’avais envisagé d’écrire une série “à la une ce soir”, sorte de carnet de citoyenne angoissée qui croit voir la fin du monde tous les soirs au JT. Ah mais j’avais déjà mis un doigt sur ce qui ne va pas dans le suivi d’actualités : le fait qu’on titille l’angoisse des citoyens volontairement pour les faire revenir tous les soirs. Depuis que je suis consciente de l’actualité, combien de fin de monde ai-je connu ? Tchernobyl, la guerre en Irak, en Yougoslavie, les tensions permanentes entre l’Inde et le Pakistan au Cachemire, le 11 septembre… j’ai même vécu en direct la fin du monde toulousaine, l’explosion de l’usine AZF.  Tiens, j’en ferai un article pour expliquer la différence entre ce que l’on vit et ce que racontent les médias. J’y rajouterai un peu de Grèce aussi… Bref, chaque JT nous raconte que l’on va peut-être mourir demain, ne vous déconnectez surtout pas !

La France a peur

Alors ce n’est pas que je ne crois pas à la fin du monde ou peu importe comme on l’appelle. Je crois juste que l’actualité, de par son essence, manque totalement de recul. Ce sont des faits dramatisés à outrance. Et leur accumulation entraîne une inévitable anesthésie. Par exemple, prenons la mort de Steve Maia Caniço. Quand on a repêché son corps dans la Loire, je me suis dit “ça y est, les gens vont prendre conscience des violences policières, il va se passer quelque chose”. Et bah pas du tout. C’est limite déjà oublié. Après tout, on préfère parler des violences policières à Hong Kong (bouh les communistes !) et glorifier les casseurs de là-bas pour mieux les condamner ici. Ce manque de recul est fascinant, ce double discours tellement troublant. “Ah les manifs violentes, je cautionne si c’est loin de chez moi”. Gniiiii ? 

Les violences à Hong Kong

“Ah mais moi, je suis passionné.e par l’actu”. Non, ça n’existe pas, ça. Vraiment, sur le coup, en regardant la vidéo d’Esther, j’étais en mode “ah mais je pourrai jamais, j’aime trop ça”. Mais absolument pas, en vérité. On peut être passionné de politique ou géopolitique, d’économie, de sociologie, de tout un tas de sujets qui sont fortement correlés à l’actualité. Mais l’actualité, en soi, c’est du bruit, constant et souvent trompeur. Surtout, en glissant vers l’idée d’être celle qui ne suit plus les news, j’ai peur de devenir la meuf inculte. J’ai moi-même cette image de gens qui ne suivent pas l’actu et qui votent ensuite pour un soft dictateur parce que “vu que j’y connais rien en politique, un mec ni de droite ni de gauche, ça passe. Il a fait de la merde depuis ? Ah, je ne sais pas, je suis pas au courant”. Je supporte pas. Sauf que l’on confond deux choses : le savoir et la compréhension. Savoir ce qu’il se passe dans le monde ne me donne pas les clés de compréhension des enjeux, ne cultive pas mon intelligence et ne me donne aucune autorité. Si demain, je me coupe de l’actu, je ne saurai pas que Dupont de Ligonnès a été retrouvé mais en fait non, qu’une personnalité, souvent âgée, est décédée et que Macron et/ou Castaner a encore dit de la merde. Et Trump a tweeté n’importe quoi. Les news vraiment importantes viendront de toute façon à moi. Par exemple : le soir du 13 novembre 2015, quand Paris a été attaquée, j’étais déconnectée de tous mes réseaux, j’étais peinarde sur le canapé de Victor en train de regarder une série ou je ne sais plus quoi. J’ai quand même su car ma soeur m’a appelée. La mort de Chirac, je l’ai vue sur Twitter… ah mais oui, du coup, va falloir que je gère mes réseaux sociaux pour me préserver de ça. On en reparlera.

Jacques Chirac

Bref, je vais couper l’actu. Maintenant, j'aimerais trouver un quinzomadaire ou un mensuel pour suivre des analyses approfondies de ce qu’il se passe dans le monde pour sortir de cette grande frénésie de l’actualité qui angoisse et qui ment. Quelque chose comme Society ou la revue dessinée, par exemple. Je ne pourrai totalement me couper de l'actu, je me promène dans la rue avec des kiosques à journaux, mais en limitant la folie de l'instantané à tout prix, je devrais éviter au maximum de m'intoxiquer avec des fake news ou des propos beaucoup trop polarisés.

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