Non. Non, non, non. Nooooooooon. Alors je sens déjà que je vais avoir des vieux mecs qui vont venir chialer dans mes mentions sans même avoir lu l’article pour répéter ad nauseam l’importance incroyaaaable de la présomption d’innocence. D'ailleurs "commentaire laissé sans avoir lu l'article = corbeille". J'ai pas votre temps et j'ai déjà écrit ce que j'avais à dire, je vais pas me répéter. Surtout que les acharnés de la présomption d'innocence sont souvent les mêmes qui pendraient par les couilles n’importe quel Arabe soupçonné de n’importe quel délit ou iraient lapider une féministe inculpée de ce que vous voulez. La présomption d’innocence, c’est encore un privilège d’Homme Blanc, que voulez-vous ? Mais tel n’est pas le sujet du jour. Aujourd’hui, je vais vous expliquer pourquoi brandir la présomption d’innocence quand on dit à une victime qu’on la croit est hors de propos.
Une jeune écrivain victime d'un monstre sacré
Je vais prendre plus spécifiquement le cas de Florence Porcel qui a porté plainte contre PPDA pour viols et agressions sexuelles. Je vais parler d’elle parce que c’est vraiment ce cas-là qui m’a inspiré cet article mais ça marche pour tous les autres. Alors qui est Florence Porcel, pour ceux qui ne la connaissent pas ? C’est une Youtubeuse spécialisée dans l’espace qui me semble assez connue dans le Youtube game, elle avait également sorti quelques livres sur le sujet. En début d’année, elle sort un roman, Pandorini sur une histoire d’emprise, une jeune actrice manipulée par un monstre sacré du cinéma. Et puis, en février, Florence Porcel avoue que cette histoire, c’est la sienne, et elle finit par porter plainte. 10 ans après les faits.
Une plainte qui heurte la vision, fausse, du viol
Ce délai entre les faits et sa plainte a fait jaser. Enfin, ça a fait jaser ceux qui aiment croire que toutes les victimes de viol sont des menteuses. Pourquoi pensent-ils ça ? Alors je ne suis ni psy ni dans leur tête mais y a quand même deux faits qui me paraissent lisibles. D’abord, ça heurte leur conception du viol. Un violeur, c’est forcément un détraqué sous substance qui attaque une femme dans une ruelle sombre. Le violeur est, dans leur vision, un malade, un rebut de la société. Donc en aucun cas un quinqua-sexa blanc célèbre. La “défense” de PPDA est la même que celle sortie pour DSK. “Il n’a pas pu faire ça”, “il est riche et célèbre, les femmes sont toutes à ses pieds, il n’a pas besoin de violer pour avoir son content”. Mais surtout, je pense que ça les fait douter. La plupart des viols n’ont pas lieu dans la rue par un désaxé. Ils sont le fait d’une personne de l’entourage.
Les plaignantes sont systématiquement dénigrées
Alors ok, les hommes manquent d’empathie. Ou ils flippent en se remémorant les fois où ils ont forcé de ouf pour obtenir du sexe, où il n’a jamais vraiment été question de consentement. Mais pourquoi les femmes attendent avant de porter plainte ? Elles réagissent en fonction d’un agenda, genre la promo d’un livre ? Alors, déjà, faut pas réfléchir plus de deux secondes pour imaginer qu’être perçue comme victime de viol ou même juste d’agression sexuelle, c’est cool. C’est dur, c’est une stigmate à vie. Alors que merde, on est victime, on ne devrait pas garder la marque à vie. Donc déjà admettre publiquement être victime de viol, c’est dur. Aussi parce qu’on sait ce qu’on va ramasser comme insulte dans la gueule. Au mieux, la victime sera soupçonnée d’arrivisme, au pire, on la traitera de folle. Vraiment, est-ce que vendre trois livres valent les tombereaux de merde qu’on va nous verser sur la tête ? Non. Quant à ceux qui ne comprennent pas qu’une femme violée ou battue ne réagissent pas immédiatement, allez vous renseigner sur les phénomènes d’emprise, de sidération ou de mémoire traumatique.
Un courage qui coûte cher
Ainsi, on sait ce que doit affronter une femme qui porte plainte pour viol. Surtout si le violeur n’est pas un désaxé de la rue. Giulia Foïs parlait très justement de son propre viol en expliquant qu’elle avait eu “la chance” d’être victime du “bon viol” et jamais sa parole n’a été remise en cause. Non mais le viol, c’est le crime où la victime est toujours supposée coupable, c’est fou. Quand quelqu’un vous raconte qu’on l’a volé, vous lui crachez qu’il ment et qu’il fait ça pour l’argent. Alors qu’il y a bien plus de fausses plaintes pour vol que pour viol… Mais non : si la personne n’a pas été violée dans la rue par un désaxé… ou par un intellectuel de gauche dans le cas de Duhamel, c’est sûr que la victime ment.
Croire n'a rien à voir avec la justice
Alors quand on dit à la victime qu’on la croit, on ne présume pas de la décision de justice. D’abord parce qu’on sait qu’en la matière, la justice peut être extrêmement tolérante. George Tron a bien été acquitté lors de son premier procès. Faudrait pas gâcher la vie de ces pauvres hommes qui ont eu un moment d’égarement. Voire plusieurs. On dit à la victime qu’elle n’est pas seule parce que dans les kilotonnes de merde et d’insultes qu’elle va se ramasser, on va essayer de la soutenir comme on peut. Surtout que la présomption d’innocence, ce n’est pas une interdiction totale d’en parler. Certains gueulent au procès médiatique et au non-respect de la présomption d’innocence dès qu’on évoque une plainte pour viol. Du coup, faudrait se taire ? Ah bah oui, ça arrangerait bien certains mais je vous garantis que ça va pas arriver.
Une plainte qui libère la parole
Depuis la plainte de Florence Porcel, huit femmes ont rajouté leur pierre à l’édifice. Certains aimeraient nous faire croire qu’elles sont toutes conspiratrices, pourquoi se sont-elles tues jusque là, c’est de l’acharnement. Ah oui parce que la présomption d’innocence, ça marche que dans un sens. On n’a pas le droit de dire que PPDA est un violeur mais traiter ses accusatrices de menteuse, là, c’est open bar. Et si vous voulez rester sur le terrain du droit : PPDA veut attaquer pour diffamation donc la présomption d’innocence concerne directement Florence Porcel, là. C’est drôle comme là, vous n’y arrivez pas. Mais bon, on va me dire que je vois du sexisme partout. Tout ça doit être un hasard, non ?
Non.