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Citizen Bartoldi

Blog d'une citoyenne qui rêve d'une société solidaire et égalitaire mais qui voit ce rêve s'éloigner chaque jour un peu plus

All men are trash, de la dénonciation du système patriarcal

Publié le 25 Août 2022 par Nina in Féminisme, Patriarcat, All men are trash

L’autre jour, un lecteur m’a demandé ce que je pensais du hashtag “all men are trash” et je me suis dit que ça ferait un bon sujet d’article, surtout dans mon ambition de série sur l’amour hétérosexuel comme système où la femme sort rarement vainqueuse. Et c’est précisément de système dont nous allons parler aujourd’hui car il va falloir intégrer une chose : quand on lutte contre le patriarcat, on ne lutte pas contre chacun des hommes. Et je pourrais sous-titrer cet article d’un “arrête d’être trigger par la parole féministe, Mec, tout ne tourne pas autour de toi. Quoi que si tu le prends si mal, c’est que tu dois pas avoir le cul propre.”

Terreur féministe

Derrière le hashtag, du sens

On pourrait opposer deux hashtags ici, le “not all men” et le “all men are trash”. D’ailleurs, c’est sur mon article sur le not all men que j’ai eu la remarque précitée. Sauf qu’ils appellent tous deux à la même chose : à dénoncer un système. 

  • Le not all men : signifie à un mec qui intervient sur un propos féministe pour dire que tous les mecs ne sont pas des ordures. Super, c’est pas du tout ce qu’on dit, arrête de confisquer notre parole pour plaider ta cause. Ta cause en tant qu’individu qui veut sa médaille de mec qui n’a jamais violé. Waouh, quelle belle perte de temps, merci, gars.
  • Le All men are trash : on est toujours dans la dénonciation d’un système et toujours pas dans une accusation ad hominem. Car quand on dit “all men are trash”, on ne dit pas que chaque individu de type masculin a commis un délit ou crime parce qu’homme, on dit juste que le système patriarcal encourage tous les hommes à être potentiellement une ordure et qu’il n’y a pas de profil type.
Un homme menaçant

Les violeurs n'ont pas de profil type

Clairement : un trash man peut être de n’importe quelle couleur ou classe sociale. De droite ou de gauche. Prenons des exemples pour être claire. GIulia Foïs a médiatisé son viol en le décrivant ainsi “j’ai la chance d’avoir été victime du bon viol”. En gros : le viol intolérable tel qu’on se le représente, dans un parking, la nuit, avec violence. La “facilité” de porter plainte avec un tel tableau. Par contre, ce ne fut pas le bon violeur. “Bon père de famille”, il a été acquitté. Comme elle le dit “il aurait été Maghrébin…”. Car la société n’admet pas que chaque homme puisse être un violeur. C’est un truc de marginal, un truc de sauvage. Un truc de gamins de cité dans des caves sordides. Ah, ça, les tournantes, à une époque, t’avais pas un journal qui n’en a pas fait ses choux gras. Pas tellement pour soutenir les victimes, d’ailleurs. Juste pour créer un imaginaire autour de la sexualité brute et sauvage de ces garçons de cité. Il en reste aujourd’hui une rhétorique forte dans les discours d’extrême-droite avec tous ces Maghrébins qui violent nos filles. A côté, c’est gros silence sur les violences sexuelles dans les grandes écoles d’ingé. Toujours l’incrédulité ou la suspicion quand l’accusé de viol s’appelle Depardieu, Besson, PPDA ou Darmanin. Alors que celui-ci a totalement admis avoir obtenu du sexe contre une promesse, ce qui me paraît être une contrainte mais hé, c’était pas dans un parking de nuit avec violence, alors…

Darmanin violeur
J'avais pas envie de mettre la tronche de Darmanin

Des violeurs dans toutes les couches de la société

Quand on dit All men are trash, on n’est pas en train de pointer tous les hommes de notre entourage pour les traiter de violeur. Personne n’a jamais dit ça, calmez-vous. Ce que l’on dit, c’est que les violeurs sont dans toutes les couches sociales. Le violeur peut autant être un jeune Maghrébin de cité qu’un bon père de famille entraîneur de foot qui “ne ferait jamais ça”. Je parle de violeur mais on peut élargir le scope à tout ce qui est agresseur, personnalités toxiques, etc. Les médecins violeurs, abuseurs, on connaît, merci. Les personnalités de gauche bien dégueulasses aussi. Les artistes, les pro-fem. Aussi incroyable que cela puisse paraître (non), il n’y a pas de profil type du mec problématique, du mec trash. Vous savez quel a été un des arguments de défense que j’ai pu lire sur l’histoire Dirty Biology “il est trop beau pour avoir besoin de violer”. Mais le viol n’est pas une histoire de misère sexuelle. Elle est histoire de domination. Relisez le témoignage de sa victime Lisa, c’est totalement une question de domination, de soumission. De la même façon, le monde est tombé de stupéfaction en découvrant que les soldats russes violaient les Ukrainien.ne.s. Hommes, femmes, enfants. Pourquoi être surpris ? Je suis désolée pour l’horreur de ma prochaine phrase mais dans toutes les guerre, le viol est une arme, quels que soient les belligérants. C’est pas juste un truc de guerriers africains. 

Les soldats sont des violeurs

Parce que le patriarcat

Tous les types d’hommes sont trash caaaaaar… le patriarcat, évidemment. Comme par exemple la culture du viol puisque cet article tourne beaucoup autour du sujet. Le fameux “non qui veut dire oui”. L’impunité pour tripoter les femmes dans la foule, dans le métro. Tout le monde s’en fout des femmes tant qu’elles ne sont pas victimes des “bons violeurs”. Typiquement, ça fait des mois qu’on alerte sur les drogues glissées dans les verres dans les boîtes et bars parisiens mais ce sont aux femmes de se démerder. C’est toujours à nous de ne pas trop boire et de faire gaffe à nos verres et s’il nous arrive malheur, c’est sans doute qu’on l’avait bien cherché. Parce que bon, on sait qui fréquente ces lieux où le moindre verre coûte 15 €, hein. De la même façon, le patriarcat apprend aux femmes à être dociles, à soigner les mecs malades, à se sacrifier pour que leur pauvre chéri aux maux parfois bien inventés se sente un peu bien. Quitte à se prendre une charge mentale de taré. Ou des coups mais l’amour, ça fait mal. Puis les femmes, elles aiment le challenge, elles aiment quand ça saigne. Le nice guy, la friendzone, c’est pas pour les vrais gars. Elles aiment les Chad bodybuildés et stupides, pas les pauvres incels qui pourraient tout leur donner. Surtout de la violence, verbale ou physique, quand elle se refuse à eux.

Pat et Nicole dans Rising Dion

Il est impossible de détecter une ordure à priori

Donc non, quand on dit “all men are trash”, on ne parle pas spécifiquement de toi, Kevin. On prévient juste nos soeurs que le prince charmant n’est pas toujours si charmant que ça. Que les ordures savent très bien se cacher sous une aura de “mec bien”. Qu’être beau ne veut pas dire être clean. Qu’être de gauche ou pro-fem ne veut pas dire être clean. Je dirais même qu’un mec qui se proclame féministe, surtout quand on lui a rien demandé, c’est du red flag. Quand on dit all the men are trash, c’est aussi rappeler qu’on ne peut pas donner un bracelet d’immunité à un mec juste parce qu’il ne correspond pas “au profil”. Bah oui, on imagine plus facilement qu’un mec qui tape sa femme, c’est un CSP moins bedonnant qui sirote ses 1664 devant son match de foot. Pas un très riche PDG qui séquestre des mineures pour les violer. Que le mec qui viole ses enfants, c’est un mec déclassé, au QI peu élevé, ayant sans doute lui-même subi des violences dans sa jeunesse. On imagine moins que c’est le fils d’un Haut fonctionnaire avec un nom de famille à particule qui viole son frère

Au-dessus de tout soupçon

Rendre notre parole inaudible, ça vous arrange ?

Le “all men are trash” est là pour nous prévenir entre nous, nous rappeler des faits que les médias n’aiment pas trop. Il n’y a pas de profil type d’agresseur, de sale type. Parfois, ils présentent très bien, ils sont père de famille, intellectuels, au-dessus de tout soupçon. Et pourtant… Alors arrêtez de détourner notre discours pour le rendre inaudible. Parce que pendant que vous faites vos sketches d’homme outragé, ce sont vos femmes, vos soeurs, vos filles, qui sont victimes d’un mec “au-dessus de tout soupçon”. A moins que vous trouviez votre intérêt dans le fait d’être vous-mêmes au-dessus de tout soupçon, va savoir. Car après tout, toutes ces drogues glissées dans les verres, toutes les femmes battues, abusées, victimes du mauvais viol, etc., elles ne sont pas toutes victimes du même homme. Peut-être que ça vous arrange de faire du bruit d’indignation masculine sur ce hashtag parce que ça vous permet de continuer à peloter les femmes en soirée, les saouler pour en abuser, ne pas respecter leur non. Ca franchement, 100% des hommes ne respectent pas le premier non, c’est insupportable. 

Non, c'est non

Et je ne vous laisserez pas faire du bruit ici

Mais on va pas se laisser faire indéfiniment, hein. Déjà, là, comme je sais très bien que je vais me prendre une poignée de mascus qui vont venir beugler dans les comms sans même avoir lu l’article… je vais pas ouvrir les comms. Vous ne noierez pas cet article dans vos cris indignés. Remerciez-moi, ça vous évitera de passer pour suspect. Et pour un con qui n’a pas lu l’article mais vu le nombre de fois où ça arrive, ma foi… Ca n’a pas trop l’air de vous déranger.