A chaque fois j’y crois, à chaque fois, je suis déçue. Il va falloir que je baisse un peu mes attentes dans la vie, peut-être. Je lance officiellement la courte série d’article sur mon premier job Bordelais, série que je vais appeler “Lalala, j’entends pas!”. Parce que “Le déni”, c’est un chouette titre mais un peu court. Une série qui devrait compter au moins cinq articles pour quasi sept mois de job, pas mal non ? Mais parce que là, on va entrer dans un nouveau genre de toxicité, celui du refus de la responsabilité. Quelque chose de moins frontal et presque plus déstabilisant.
Ma nouvelle vie rêvée
J’ai rêvé de ma nouvelle vie Bordelaise. En quittant Paris pour la province, il y avait une sorte d’abandon de l’idée de “faire carrière”. Bon, ça fait des années qu’en vérité, j’ai intellectualisé le fait qu’être “head of” ou N++ de je ne sais qui ne m’intéressait pas. Mon épanouissement ne passe pas par ça. Mon épanouissement ne passe actuellement pas par le travail salarié même si j’essaie de travailler là-dessus. Je veux dire quitte à y passer la majeure partie de mon temps éveillé, il faut quand même y trouver compensation. J’arrivais donc à Bordeaux avec cette optique. D’autant que mon nouveau poste marquait ce fait avec un salaire nettement inférieur à mon dernier salaire parisien (-30%, on est sur du -15% normalement) et un poste plus exé mais avec possibilité d’évolution. Mon cher et tendre n’était pas trop d’accord pour que j’accepte ce job mais je voulais un pied à l’étrier dès mon arrivée à Bordeaux. Et puis j’intégrais l’antenne locale d’un grand groupe, y avait possibilité de quelque chose, sans doute.
Un plan clair et net
J’accepte donc de rejoindre Sunlight, d’autant que la promesse m’enchante. “Bon, on sent que t’es pas super aguerrie au SEA (euphémisme), on va te former”. Mais génial, ça ! Petit point explication. Le SEA, c’est donc tout ce qui est publicité payante sur les moteurs de recherche. Google, quoi. Et Youtube. C’est un levier très important pour l’acquisition digitale car tu chopes beaucoup de clients par là, notamment via l’onglet Shopping. Chez Epicea, ça représentait plus de 50% des visites et presque autant pour les ventes et le chiffre d’affaire. Et moi, je maîtrisais mal cette brique, ce qui m’éliminait du recrutement de pas mal de poste. Donc, là, le plan était clair. J’arrive, j’apprends, je deviens la reine du SEA et deux ou trois ans plus tard, je me retrouve un poste de responsable acquisition. Bon, ça, c’est la théorie. Ca s’est pas du tout passé comme ça.
Dès le départ, ça s'annonce compliqué
Premier jour. Il pleut des cordes, comme souvent à Bordeaux. J’arrive un peu en avance donc je vais faire un coucou à la Garonne puis j’avise deux filles qui attendent devant les locaux. “Hé salut, vous travaillez chez Sunlight ?” Et là, une des filles s’écrit “Ah mais tu dois être Nina ! Tu rejoins mon équipe. Heureusement que tu arrives, on s’en sort plus, là”. Heu bonjour ? Je panique un peu. Pardon mais j’étais censée être formée d’abord, non ? Bon. Ma N+2, Caroline, arrive et tout le monde rentre. Un peu paumée, je suis d’abord la fille de mon équipe à l’étage mais ma N+2 étant au rez-de-chaussée, je redescends m’installer avec elle. Elle me raconte vite fait l’histoire du groupe, me colle un ordinateur portable dans les bras.
“Tu veux un double écran ?
- Non, j’ai ce qu’il faut chez moi.
- Ok. Souris, clavier ?
- Souris, oui, je veux bien.
- Ah non, on sépare pas la souris du clavier”.
Ah ok… Elle m’explique donc que je devais être reçue par Julie, une fille de mon équipe mais celle-ci est absente car en arrêt maladie pour une cause un peu mystérieuse. Il est question d’accident ou je ne sais quoi. Oh crap ! Et ma N+1 sera en distanciel jusqu’à son arrêt maternité car elle est enceinte ! Et clairement, elle va être arrêtée dans les prochains jours définitivement. Ok donc ma N+1 et son bras droit sont out dès mon premier jour, chouette. Bref, Caroline m’invite à retourner à ma place pour “configurer mon pc”. Quoi ?
Des chefs visiblement débordés
Oui parce que y a pas de service informatique vraiment donc je démarre ce pc… avec mon mail perso. Niveau sécurité, on est au top. Mon mail pro va finir par arriver. Je commence à me sentir un peu perdue. Il n’y a pas grand monde car on est encore en pleine restriction Covid. Des gens arrivent et s’assoient sans me calculer alors qu’il doit y avoir une quarantaine de salariés en tout donc une nouvelle tête, ça se repère. Je demande pour la suite Office “ah ben prends la période d’essai, on verra comment on fait”. Spoiler : c’est moi qui ai payé la licence à la fin. 10h, revoici Caroline. J’ai compris que j’étais installée à la table des team Leaders et quand elle se met à crier “bon, j’ai plus rien avant 11h, qui vient m’aider à ranger le bureau du fond” et que je vois plusieurs Team leaders la suivre, je me dis que la fille du dehors a peut-être exagéré sur la charge de travail. Je veux dire si le lundi à 10h, ta principale tâche, c’est de ranger des cartons, ça va.
Y a comme un malaise
A propos de la fille du dehors, Lisa, la voici qui vient me voir. “On a une réunion d’équipe à 11h, tu veux venir avec moi ?”. Heu bah oui, plutôt… Vu que je ne sers à rien, là, de suite. Je rencontre donc mon équipe. Caroline, la team leader enceinte. Oui, ma N+1 et +2 s’appellent toutes les deux Caroline. Nous avons ensuite Agnès, Benoît et Arnaud. Des vingtenaires qui ont l’air sympa. Chacun parle de ces sujets et, ô surprise, je découvre que c’est un peu la panique parce que ce sont les soldes. Ah oui… Donc des tas d’annonces à mettre en place. Je note quelques noms de clients mais je fais figuration. Même si je tique un peu quand j’apprends que chaque consultant va avoir droit à un binôme de l’agence de Lyon pour progresser dans sa pratique… Sauf moi parce que je serai “sur la stratégie”. Mais on m’avait dit qu’on allait me former, non ? Donc… ? A la fin de la réunion, je redescends et un mec que je ne connais pas du tout me propose de déj avec son gang. “Heu mais je sais pas, je vais peut-être déjeuner avec Caroline ?” “Ah ben non, elle est déjà partie se chercher à manger”. Oh well...J’attache une importance particulière au dej du premier jour et là, mes warnings s’allument. Quelque chose ne va pas.
Une personnalité écrasante
Bref, on va s’acheter à manger et on va tous déjeuner dans une salle de réunion où on retrouve, entre autre, Caroline et la DG, Solène. Alors la DG, c’est avec elle que j’avais passé les entretiens. Elle et un gars nommé Grégoire qui aurait été mon chef s’il ne s’était pas barré entre temps. Ce qui me dérange un peu c’est que, selon mes calculs, le mec m’a fait passer un entretien alors qu’il savait qu’il partait. Chelou. J’ai cependant un a priori sur Solène, je ne la trouve pas très sympa. Elle m’avait un peu taclé sur un entretien et ça m’a foutu mal à l’aise. Et là, la meuf prend touuuuuute la place. Elle parle, elle parle. “Moi, ma vie, mon oeuvre”. Bon, je me sais pas objective, laisse tomber. Elle me dit qu’on se verra fin de journée pour qu’elle me parle un peu de mes missions. Euké.
Un contrat pas du tout avantageux
Parlons maintenant du rythme de travail car là aussi, je suis perplexe. Je vais signer mon contrat et un truc me fait tiquer. Je bosse donc de 9h à 18h30 avec une pause de 12h30 à 14h, sauf le vendredi où je finis à 17h30. Des horaires ? Ah oui, je ne suis plus cadre… Okay. Et c’est bizarre, je n’ai droit qu’à 6 RTT alors que si mes calculs sont bons, je dois bosser 39h par semaine. Y a une douille, non ? Hé oui, la douille des heures supps défiscalisées ! Pour me proposer un salaire compétitif (mmm), une part de mes revenus sont des heures supp “obligatoires”. Donc en résumé, je bosse plus que mon ancien job, j’ai moins de congés et en plus, je cotise moins. Et bah mon con, ils ont de la chance que je sois empêtrée dans mon injonction du “fais plaisir” parce que la douche froide est assez violente. A l’image de la météo.
Une première semaine animée
On va terminer cet article sur mes deux dernières réunions de la journée. D’abord avec Solène qui me détaille mes clients. Dont une marque que j’aime bien donc je suis plutôt contente. Je serai en binôme avec Benoît sur quasi tous mes clients sauf un que je vais traiter avec Lisa. Et justement, je dois aller en réunion avec Lisa pour le client en question que je vais appeler Satan car il a été clairement au centre de mon Enfer même si… Ah et j’ai un rendez-vous client le jeudi dans la pampa Lot-et-Garonnaise. Euké. Lors de la réunion avec Satan, j’apprends que je vais devoir aider Lisa à mettre des annonces en ligne mais on va me montrer. Ah cool, les choses sérieuses commencent.
Allez, ça va aller
Bref, à 18h25, je pars. Un peu en avance mais pardon, j’ai rien à faire donc inutile de faire durer le suspense, non ? Je suis un peu mitigée sur cette première journée mais après tout, je rentre dans le vif du sujet direct. Ca va le faire !