Convaincre les peu impliqués d’arrêter de voter conservateur

Parfois, je me demande comment changer les choses. Au niveau électoral, je veux dire, au niveau de perception des différentes forces en présence. Parce que bon, on peut discuter pendant des heures du fait que la lutte passe ou non par les urnes, on peut constater que laisser le pouvoir institutionnel à une droite néo-libérale fortement compatible avec l’extrême droite, ça finit par coûter cher. Et le souci, c’est qu’en l’état, je ne vois pas comment on peut arrêter le glissement à droite et comment on peut s’éviter une Marine en 2027. Déjà que pour le moment, la seule chose qui nous a préservé de ça, c’est sa profonde nullité… Bref, autant je n’attends de la Nupes aucun miracle, autant si on pouvait freiner la dégringolade qui nous amène directement au fascisme, je prends.

La gauche, ennemi désigné

Sauf que voilà, l’ennemi, c’est la gauche. Sauf deux ou trois PS beaucoup trop Macrono-compatibles pour être honnêtes. Toute la Nupes est taxée d’extrémiste parce que… parce qu’on manifeste pour nos droits, apparemment. Pour protéger ce qu’il reste de nos acquis sociaux, qu’on arrête de se faire dépouiller pour entretenir nos milliardaires qui n’auront jamais assez d’une vie pour tout dépenser. Ces putains de nuisibles sociétaux, ceux qui prennent tout sans rien rendre. Mais paraît qu’ils font ruiseler. Je suppose qu’on n’a pas la même définition du mot. La doxa néo-libérale marche à plein tube et pour beaucoup, travailler deux ans de plus, c’est un effort nécessaire. Ca sert à rien de faire un caprice. Et puis les syndicats, c’est tous des cons, des branleurs, ils sont juste là pour faire chier.

Vous êtes trop cons pour comprendre

Evidemment, ça me rend fumasse que ces mensonges éhontés soient avalés par ceux qui ne s’intéressent pas à la politique. Surtout qu’on nous répète ad nauseam que nous, on ne sait pas. On n’est pas qualifiés pour comprendre. Les politiques, ce sont des gens très intelligents qui ont fait de grandes écoles donc t’inquiète, ils comprennent pour nous. Alors déjà, c’est faux. Les ministères, c’est la foire à la saucisse. C’est très rare qu’une personne vraiment qualifiée de par son parcours professionnel ait un poste lié à sa compétence initiale. Y a qu’à voir le jeu des chaises musicales. Voyons, un médecin, où vais-je le mettre ? Ah bah au Ministère des Affaires étrangères ou porte-parole du gouvernement, très bien. Bon, cependant, les docteurs Ministres ne sont pas forcément qualifiés pour être Ministres de la santé non plus vu que souvent, ils ne sont plus sur le terrain ou il n’ont aucune difficulté à se renier pour assurer leur place. On a bien rigolé en posant à Dussopt exactement la même question que celle qu’il avait posé y a dix ans pou une réforme des retraites similaire. Mais bon, si le mec n’a aucune colonne vertébrale, comme pas mal de politiques, à l’arrivée, c’est quand même nous les dindons de la farce.

C'est pour votre bien, enfin...

Voici donc l’histoire “oui, on passe des réformes impopulaires mais promis, on n’a pas le choix. Nous on sait, on a les chiffres. Et si vous êtes contre, c’est parce que vous êtes réfractaires au changement”. La fameuse France ingouvernable, inréformable avec un gouvernement qui fait passer je ne sais combien de lois par semaine parce que Macron se rêve en Président réformateur. Franchement, on se moque des Anglais et de leur vieille monarchie au decorum poussiéreux mais au moins, leur Roi, il a un pouvoir de nuisance très limité. Il coûte très cher, oui. Mais le nôtre, même si on le garde dix ans, non seulement il nous coûte une blinde, il nous dépouille de nos biens collectifs mais en plus, il met le pays à feu et à sang. Franchement, le jour où on arrivera à se débarrasser de l’image du dirigeant unique, grand sage parmi les sages, béni des Dieux ou je ne sais quoi, on va faire un grand pas en avant. Donc non seulement on vous traite de cons mais en plus on vous explique que voter à gauche, c’est dangereux parce qu’ils vont tout vouloir révolutionner, là. Attends. Donc les gauchistes, ils sont réfractaires au changement et faut pas voter pour eux parce qu’ils vont changer trop de choses. C’est n’importe quoi ? Oui mais comme c’est pas dit dans le même discours, ça passe. Bref, le vote prudent, c’est celui pour la force conservatrice qui va tout gérer à la papa, t’inquiète. Les gauchistes, ils y connaissent rien. Oui, il y a beaucoup de docteurs-chercheurs, ils ont même des prix Nobel dans leur sphère mais ce sont juste des crados idiots, pro-mis.

L'impossible dialogue

Alors vu comme ça, on pourrait croire que la partie est facile. SI le discours officiel est si absurde, on peut le dézinguer en deux arguments et trois exemples. Ah oui sauf que les non-impliqués en politique ne veulent surtout pas en entendre parler. La politique, c’est chiant, ça fait des disputes. On ne sait pas, on n’est pas informés. Il y a une double impasse ici. D’un côté, tu as ceux qui “savent” et pensent que leur avis ont une valeur alors qu’ils n’ont jamais rien lu, vu ou écouté sur un sujet. Ceux qui parlent de lobby des minorités, qui trouvent que les minorités qui essaient de s’affirmer menacent l’unité nationale. Bon, déjà, l’unité nationale, j’en ai bien rien à faire. Ce qui m’intéresse, c’est la solidarité et je peux te garantir que c’est pas des drapeaux colorés ou une meuf voilée qui menace ça. Et de l’autre, t’as ceux qui ne se sentent aucune légitimité à se préoccuper de politique. Déjà, rien que le mot politique fait peur. L’autre jour, un inconnu m’a agressé sur Twitter car je répondais à un tweet (pas le sien) “On ne naît pas de droite, on le devient”. Et là, un gars sorti de nulle part vient me pourrir en mode “mais vous faites chier à tout politiser”. Mais Jean-Crétin… Déjà, calme-toi mais surtout… bah désolée mais tout est politique. 

Mais moi aussi, je déteste la politique politicienne

Moi non plus, je n’aime pas ça, la politique. Dans le sens politique politicienne. Je vomis tous nos politiques, à de très rares exceptions près. Déjà, je crois que je vomis tous les hommes politiques, quelques femmes trouvant encore grâce à mes yeux. Bien sûr que je déteste ces piètres acteurs qui anonnent des propos que d’autres ont écrit pour eux, qui ne comprennent parfois même pas ce qu’ils disent ou ne sont pas capables de répondre correctement à une question. Ces gens foncièrement incompétents qui n’ont que leur aplomb à vendre. Cette politique là, elle est bien trop lucrative pour être laissée aux mains de ceux qui n’agiraient que dans une volonté de bien commun. Ceux-là ne durent pas car il se rendent vite compte qu’on leur demande de paraître. Pas d’agir. Ce qui m’intéresse en politique, ce sont les engagements, l’analyse des forces qui régissent la société. Plus je me penche sur la sociologie et plus je trouve ça riche en apprentissage et en éclairage de ce que l’on vit. Mais comment parler de ça à des gens qui ne veulent pas savoir, qui ne veulent pas de vague. Qui pensent qu’on cherche à les culpabiliser avec nos choix de vie. Vous vous rendez compte de la haine qu’on entretien en France vis-à-vis de personnes qui cherchent à réduire leur empreinte carbone juste en ne mangeant plus de viande. Comment peut-on penser qu’une société qui pense qu’un régime alimentaire peut être source de moquerie et ne mérite pas le respect; est une société en bonne santé ? On en est quand même à se battre dans l’hémicycle sur la question des repas végétariens à la cantine. Mais si moi, je ne veux plus manger de viande, je ne force personne à en faire autant. Calmez-vous.

Quel levier ?

Alors oui, la politique policitienne, c’est nul. Oui, la gauche parlementaire n’est pas pure, belle et innocente. Perso, j’espère qu’il n’y aura pas de liste Nupes aux européennes juste pour mettre une fessée à LFI pour l’affaire Quatennens. Et pour faire dégager le vieux, aussi, ras le bol de lui. De toute façon, je déteste la personnification du pouvoir et y a vraiment aucun politique, à droite comme à gauche, qui ne me satisfasse vraiment. Même les femmes, dès qu’il y en a une que je trouve intéressante, elle va sortir une énorme connerie. Cependant, si je pense sincèrement que la politique politicienne n’est pas l’alpha et l’oméga des changements sociétaux, dans la société dans laquelle nous sommes aujourd’hui, on va galérer à créer une société plus altruiste et solidaire sans choper l’Assemblée. Alors du coup, je continue à réfléchir sur comment on va faire réaliser aux gens que non seulement ils n’ont rien à perdre avec la gauche mais que ce sera même un gain pour tout le monde. Que les pauvres ne sont pas des ennemis et que personne ne vit bien juste au RSA. Que quand des gens se retrouvent en comité pour réfléchir, le fruit de leur réflexion penche forcément à gauche*. Que non, une politique droitière d’austérité n’est ni une fatalité ni un effort nécessaire. Je réfléchis mais pour l’heure, j’ai pas encore le levier...

* J'ai entendu ça dans un podcast mais je ne retrouve pas la source et j'ai pas le temps de chercher mais je vais me repencher là-dessus car y a un truc à gratter.