Ma vie est une collection de mésaventures professionnelles. Rien que sur ce blog, on a eu les journaux de démissionnaires avec TGGP et Pubilon, l’enfer avec Vanessa la manipulatrice. Puis le cauchemar Vinyl avec Michel le toxique, Épicéa pour l'ensemble de son œuvre, Sunlight pour terminer. Là, je suis retournée chez Vinyl et… il ne se passe rien. Mais genre rien du tout. Mais c'est toujours mieux que le chômage. Certains me diront que tout cet étalage d'histoires pro, ça sert à rien. Voire que je suis une victime au sens "fragile" du terme. Si vous voulez. Sauf que des témoignages sur la maltraitance professionnelle, je ne fais pas qu'en écrire; J'en lis, aussi. Et alors que je me pensais bien au fait de toutes les petites manigances, les petites remarques acerbes et compagnie, c'est en lisant les témoignages d'autres personnes que j'ai repéré des patterns que j'avais subis sans les identifier comme problématiques. Les témoignages, ça fait tomber les peaux de saucisson qu'on a devant les yeux.
Même si j'ai pas vécu le pire
Sur Instagram, j'aime bien lire les auteurices BD. J'ai donc découvert via Sandrine Deloffre une nouvelle autrice, Carreaux_Line. Et Carreaux_Line commence fort avec un témoignage de harcèlement au travail. Je vous cache pas que ce sont des lectures qui me sont pénibles, j'avais la tension au plafond en la lisant, la mâchoire serrée. Parce que chaque élément relevé par Carreaux_Line, je les connaissais. Si je ne les avais pas vécus directement, j'avais lu des témoignages les évoquant. Ah non parce qu'en vrai, je suis une petite joueuse niveau catastrophe pro. Je n'ai jamais vécu de harcèlement sexuel même si j'ai eu le droit à mon lot de remarques déplacées. Genre ce patron alors que j'étais stagiaire qui clame lors d'un déjeuner "ma femme est super jalouse. Je l'ai trop faite râler en lui disant :"ouah, tu verrais la nouvelle stagiaire…". Heu… bonjour, je suis là ? Dans la même pièce que toi ? Sous ton nez. Évidemment, j'ai eu droit aux collègues bourrés un peu trop collants ou tactiles dont tu ne sais pas trop comment te débarrasser. J'ai eu vent des systèmes de notation des femmes de l'open space dans une des agences que j'ai fréquentées. J'ai barboté dans des ambiances parfois un peu trop sexualisées. Mais pas de harcèlement sexuel direct. J'ai pas non plus eu droit aux messages à pas d'heure et ce genre de harcèlement. Des messages pendant mes vacances, oui. Mais des messages à 2 ou 3h du matin, non. Même si dans ma boîte actuelle, je sais pas si c'est Teams qui met n'importe quoi comme heure mais y a comme une course à l'échalote à celui qui écrira un message à l'heure là plus improbable. La gagnante pour le moment, c'est un teams à 4h du matin dans la nuit d'un samedi à dimanche. OK, la meuf en question est en période d'essai mais j'ai beau être moi-même en période d'essai, ce genre de petit délire n'arrivera jamais. Essentiellement parce qu'à 4h du matin, je dors. Même si les chats me réveillent en criant ou en lâchant un caca qui pue (ce qui me réveille réellement), je vais pas aller sur Teams.
Les petites remarques qui piquent
Cependant, même si je n'ai pas tout vécu, je sais les choses. Mais il y a des trucs qui me sont arrivés et que je réalise à posteriori, notamment en lisant la BD de Carreaux. Par exemple, les remarques sur les vacances. J'ai eu beaucoup ça dans l'agence où j'ai hérité de Vanessa en manager. Dès que je partais en vacances, c'était la même rengaine "t'as trop de la chance" et "t'es toujours en vacances, toi". Heu… mais j'ai le même nombre de jours de vacances que les autres, en fait. Déjà, point 1 : je ne suis pas tout le temps en vacances, non. Genre je suis présente quasi tout l'été quand vous, vous êtes en vacances. Et c'est même pour ça que vous pouvez partir, parce que je tiens le navire… Ensuite, je prends rarement plus de deux semaines d'affilée donc oui, mes cinq semaines, je les étale. Mes RTT, j'essaie de les placer stratégiquement. Donc non, je ne suis pas tout le temps en vacances. Je suis juste en vacances quand vous, vous n'y êtes pas. A l'époque, ce genre de remarques, je laissais filer parce que je n'y voyais rien derrière. Mais en lisant la BD de Carreaux, je réalise le mécanisme de culpabilisation qui se cache derrière. Le côté "ah oui, tu es un peu ici en touriste, finalement", "tu n'es pas très impliquée". Mais je vais pas m'excuser de prendre les congés auxquels j'ai droit, hein…
Je vais pas me sacrifier gratos
Alors cette histoire peut paraître anecdotique mais en lisant la BD de Carreaux, j'étais à deux doigts de tomber de ma chaise. Je l'avais pas vue, celle-là. Alors que oui, ça ne m'était pas toujours dit très gentiment, cette histoire de vacances. Il y avait parfois comme un air de reproches. Pour le coup, ma présence en été, elle avait été soulignée par… Antoinette chez Épicéa. Quand j'étais partie en septembre, elle avait clairement dit en réunion d'équipe juste avant mon départ "Celles qui ont gardé la maison tout l'été vont prendre un repos mérité", un truc du genre. Oui, voilà ! Moi, ça ne m'intéresse pas de prendre le mois d'août, je n'ai jamais été une aoutienne, contrairement à tout le monde. Les managers devraient se réjouir qu'on soit quelques un·es comme ça à ne pas compliquer leurs calculs plutôt que de faire des remarques déplacées sur nos vacances. Surtout qu'au délà d'une simple question de calendrier… Ta boîte, c'est pas la mienne. Je te donne ce pour quoi je suis payée. Et encore, dans cette boîte, je partais rarement avant 19h-19h30 et je me suis collée pas mal de nocturnes. Je me souviens d'avoir envoyé des documents à 3 ou 4h du mat donc bon… Je pense avoir été suffisamment pigeonne. Et encore, ça n'a jamais suffit. Mais j'ai une vie, en fait.
Ah mais c'est pas normal ce que je vis ?
Je parle du témoignage de Carreaux mais ça marche pour pas mal de choses. On n'a pas toujours conscience que ce que l'on vit est anormal. Surtout que quand je lis les témoignages de Balance ton agency, je réalise que les boîtes les plus toxiques bossent essentiellement au stagiaire. Donc quand tu commences ta carrière dans une boîte où si tu pars avant 22h, tu n'es pas quelqu'un de fiable, difficile de challenger ça. Ça me fait penser à un tweet croisé les dernières semaines. Pas sur le monde du travail mais vous allez voir le parallèle. Une soirée anodine entre copines quand l'une d'elles raconte un truc sur son mec, une habitude qu'il a. La personne ayant tweeté ça n'a pas donné de détails mais en gros, c'est l'effroi dans la gang de filles. Je ne sais pas ce que faisait le mec mais c'était apparemment très grave et c'est par là parole de ses amies que la concernée a pris conscience du truc. Quand on a le nez dans le sable, difficile de voir la dune. Surtout dans le monde du travail qui nous formaté bien à nous faire cracher bien plus que ce que l'on est en état de donner. Et la plupart du temps, vous ne gagnerez rien, de toute façon.
Témoigner pour aider les autres
Alors oui, les témoignages sont importants. Bon, déjà, ça fait toujours du bien, personnellement, de vider son sac. Mais surtout ça peut faire tilt chez quelqu'un qui va lire votre histoire et reconnaître des éléments qu'il n'avait pas identifié comme problématique. Je parle du monde du travail mais ça marche pour tout. Les relations amoureuses, les amitiés, les relations avec son proprio, son voisin, allez savoir qui. On traverse tous et toutes des histoires malheureuses. On apprend parfois de nos erreurs, on repère des patterns chelous. Certains arrivent même à travailleur sur eux pour ne pas retomber dans des relations toxiques. Bon, pas moi, mais certains si. Alors imaginez que vous puissiez empêcher à une personne, même une inconnue, de vivre l'enfer que vous avez vécu. Ou juste une embrouille bien pénible. Qui refuserait ça ? Au pire, même les moins empathiques ne résisterait pas au plaisir de couper l'herbe sous le pied de son ancien bourreau, non ?
Se protéger les uns les autres
Alors témoignons. Sur nos blogs et nos réseaux sociaux, sur des podcasts, des neurchis, des Discords, ce que vous voulez. Écrivez des BDs, réalisez des vidéos, choisissez votre format. Dézinguons tous les toxiques indélicats de notre entourage. On a tous et toutes le droit à un job dans des conditions sereines, une relation amoureuse apaisée, des amitiés joyeuses. Évidemment, il y a des crises et des coups durs, hein. Je vous dis pas de couper les ponts avec un·e ami·e qui traverse une passe difficile parce qu'il vous sollicite plus que d'ordinaire, par exemple. Non, non. Je parle de réelles relations toxiques qui vous pompera l'énergie et la santé mentale sans rien vous rendre en retour. Les témoignages sont importants parce que si vous avez été abîmé·e par une expérience, c'est cool d'éviter à quelqu'un de subir la même chose.